dimanche 22 août 2010

Sur la "pénalisation" du sida



Il s’est passé quelque chose cette semaine sur le sida. On a pris connaissance des derniers chiffres de l’InVS sur les nouveaux cas d'infections à gonocoques (chaude pisse) qui ont augmenté de 52% en un an seulement, de 2008 à 2009. Non seulement ces chiffres sont impressionnants et récents, mais ils donnent une idée presque en temps réel de ce qui se passe en 2010. On peut déjà supposer que la banalisation du Treatment as Prevention va contribuer à l'augmentation des IST que l'on constate depuis dix ans. Le TasP, qui propose de réduire la transmission du VIH par des campagnes intensives et ciblées de dépistage et la mise sous traitement des séropositifs pour faire baisser leur charge virale et les rendre moins contaminants, fait que les gays mettent moins souvent la capote et ils ont moins peur du sperme lors des fellations. La « couverture » espérée du TasP entrainera forcément une augmentation des IST puisque le TasP concerne la prévention du VIH (théoriquement) mais pas les IST.
Comme d’habitude, sur les webzines gays, ces chiffres qui pourtant concernent aussi les gays sont annoncés sans faire de commentaire, et certains sites n’en parlent pas du tout. Et Dieu sait que lorsque l’on apprend qu’un acteur hétéro est en couverture d’un magazine gay à l’autre bout du monde, l’info circule.
Donc on ne parle pas beaucoup des IST chez les gays et on ne parle pas beaucoup non plus beaucoup de la récente affaire de juridicialisation de la transmission du VIH alors que tout le monde en a parlé, il y a une dépêche AFP, Doug Ireland a relayé l'article d'Edwn J Bernard dans le Guardian, etc. Déjà, il me semble que certaines rédactions ont envie de faire une impasse d’info sur ces cas de contamination volontaire (ou pas). C’est un sujet sur lequel on s’est écharpé et il y a peut-être l’idée selon laquelle si on n’en parle pas, le phénomène prendra moins d’importance. Le problème, c’est qu’il y a deux forces importantes en jeu.
Primo, certains de ces procès ont un retentissement international, comme l’affaire des 3 séropos hollandais qui avaient drogué et infecté 12 partenaires de partouze en leur inoculant du sang contaminé (un des accusés était infirmier, pratique). L’autre exemple est le cas récent de Nadja Benaissa, une chanteuse allemande qui s’est exprimée la semaine dernière lors du procès pour s’excuser. Elle avait contaminé un de ses ses partenaires en ne lui disant pas qu’elle était séropositive, chose qu’elle considère aujourd’hui comme stupide. Donc c’est une affaire qui prend une nouvelle tournure. L’accusée n’est pas, comme c’est souvent le cas, une personne lambda, des classes modestes. C’est une artiste célèbre.
Donc, la force médiatique de ce procès est émotive et éthique. Secundo, il ne faut pas sous-estimer la force des avis exprimés par les internautes qui lisent (ou pas) les news liées à ces procès. On l’a vu avec d’autres affaires dans d’autres médias et pas les pires comme Libération, quand les gays s’expriment sur ces procès, ce n’est pas toujours l’argumentaire pré-enregistré, que l’on retrouve dans l'article du Guardian. Non, ils ne croient pas que ces affaires font le jeu de l’augmentation des cas de sida sous l’idée communément acquise (par qui ? où ça ? des études ?) que les gens ne se dépistent pas par peur de ces procès. D’abord, ces procès sont rares: plusieurs centaines de cas dans le monde, sur des millions de personnes infectées. Ensuite, le dépistage a de gros retards dans notre pays, surtout chez les gays, largement du fait des lenteurs d’adaptation des associations de lutte contre le sida et du gouvernement sur le dépistage rapide. Ce n’est donc pas ces procès qui effraient les gays au point de refuser de se faire dépister. Ils ne se sont pas dépister car, pour l’instant, ni les associations ni le gouvernement ont décidé de lancer une grande opération d’incitation au dépistage rapide pour vraiment accompagner le concept du TasP. Mettre tous les séropos sous traitement sans aller chercher les 40% de gays qui sont séropos sans le savoir, c’est bancal, ça ne marchera pas. C’est comme si vous éteigniez un feu qui continue de brûler sans entrave un kilomètre plus loin. Les 40% qui ne se savent pas séropos vont continuer à faire circuler le virus alors que les pratiques de prévention vont se relâcher encore plus qu’aujourd’hui (c’est un euphémisme).
Quand les gays s’expriment sur ce sujet, on est loin du discours rabâché lors des conférences internationales. Et il vaut mieux que le modérateur du site soit là pour mettre de l’ordre. Une bonne partie des lecteurs est ulcérée parce qu’ils le prennent personnellement. A force de nourrir ces sites Internet gay de faits divers, ils ne comprennent pas que l’on passe sous silence des histoires parfois choquantes. Ils voient bien que le risque du VIH et des IST se rapproche d’eux, même quand ils sont safe. Rappelez-vous, 52% d’augmentation de chaude pisses en 1 an, cela fait beaucoup de personnes qui se sont emmerdées à traiter une bléno, des condylomes ou une syphilis. Et je ne parle pas de l’explosion des hépatites C chez les gays.

Donc les homosexuels ont un rapport passionnel et moral face à ces procès. Parce que le sexe n’est pas que du cul, il y a tout ce qui l’entoure, le comportement des partenaires, la politesse, la correction, la morale, appelez ça comme vous voulez, mais quand on baise, on n’a pas envie de rencontrer quelqu’un qui va nous faire du mal tout en le sachant. Voilà les mots qu’il faut dire sur ces histoires. Qu’il y ait des procès ou pas (et c’est ma position catégorique depuis toujours), ce n’est pas à moi d’en décider, mais je refuse publiquement que ce soit un sujet tabou dans le sens où les gens se font des procès pour trois fois rien aujourd’hui et je comprends mal que les leaders associatifs s’adressent à l’ensemble du système judiciaire pour demander de ne pas instruire ces affaires parce qu’il faut étouffer dans l’œuf l’idée même de faire un procès si on a été affecté d’une manière particulièrement abjecte. Si on avait l’affaire des 3 gays hollandais séropos, on réagirait comment ? On dirait qu’il ne faut pas faire de procès ?

La troisième force en jeu dans ces procès, c’est le lobby international contre la jurdicialisation de la contamination du VIH. Depuis le célèbre appel du juge Edwin Cameron en Afrique du Sud, que Laurent Chambon et moi avons rencontré en 2007 pour Têtu, il y a cette idée que ces procès ont un impact encore plus grave dans les pays en voie de développement. C’est ce que nous rappelle l'article du Guardian. Et c’est vrai, c’est un fait. Il y a donc une forte pression pour faire étouffer ces procès dans les pays occidentaux (riches) parce que cela affecte les pays en voie de développement. Encore une fois, on nous demande d’ajuster notre éthique occidentale par rapport à ce qui se passe au sud. OK. Mon point de vue, de gay à gay, c’est que l’appel de Cameron est tout à fait justifié. Nous ne vivons pas, en Europe et en Amérique, comme si on était à Soweto. Nous sommes dans des pays obsédés par la protection, tout le monde le sait, et c’est un droit légitime de faire appel à la justice quand on considère que l’on a subi un préjudice qui ne peut être apaisé par l’oubli. Nous sommes dans des cas moraux qui sont très proches du viol. Bref, des sentiments très profonds qui demandent, parfois, une décision de justice par respect de ce que l’on est, pas forcément pour punir la personne accusée. Il faut arrêter de considérer le sida comme une maladie qui a ses propres lois. Surtout quand on vit dans un pays riche, où les tests de dépistage sont partout, les capotes et le gel aussi, ainsi que les traitements d'urgence et les multithérapies que les pays pauvres n’ont pas encore. Sur ce sujet, l’éthique ne peut pas être la même partout car cela fait dix ans que nous avons les multithérapies dans nos pays (pas dans le sud) et nous savons tous que cela change l’essence même de ce qu’est le sida.
Je répète : je n’ai jamais dit qu’il fallait emprisonner les personnes qui contaminent. On ne peut trouver nulle part une expression de ma part qui va en ce sens. Je ne suis pas une folle sécuritaire, je n'ai même pas particulièrement confiance en la justice de mon pays. Et je ne crois pas que ces lois qui ont été instaurées à travers le monde ont un rapport direct avec l’espoir de réduire l’épidémie. Donc tout l’argumentaire actuellement présenté au plus au niveau des conférences internationales et si bien résumé par Edwin Cameron passe à côté de l’élément central : si la grande majorité des procès à travers le monde ne concerne pas des transmissions volontaires, que fait-on lorsqu’elles le sont vraiment, avec volonté de nuire ? On passe à autre chose ? On oublie ?
Ce que je dis depuis toujours, c’est qu’il y a des jugements de justice qui n’entraînent pas forcément l’incarcération. Il peut y avoir des décisions symboliques. On ne peut pas, non plus, s’en tenir au cliché du « On ne peut pas mettre un flic derrière chaque homosexuel ». C’est une réponse profondément idiote, car c’est ne pas comprendre l’évolution de cette épidémie dans les pays riches, nourrie par la remontée des cas de contamination chez les gays qui disposent de tout pour se protéger, ce qui n’a rien à voir avec ce qui se passe dans les pays en voie de développement. Chaque avancée thérapeutique comme le TasP nous éloigne un peu plus du standard de soins des pays pauvres. Le TasP est une stratégie thérapeutique de prévention pour les pays riches et on est loin de l’introduire en Afrique où l’on est même pas en mesure de donner des antirétroviraux à ceux qui sont malades. Nous sortons d’un dogme de 30 ans où la capote était centrale et on entre dans une nouvelle ère où on dit aux gays : « Vous pouvez oublier la capote si vous faites ceci ou cela ». Ce n’est vraiment pas le message de prévention qui est offert en Afrique du Sud, je vous le garantis.

Que ferions-nous si nous étions un des 12 homosexuels endormis endormis sous GHB et médicalement contaminés par trois séropos qui ont déclaré : "plus il y a de séropos chez les gays, mieux c'est"? Que ferions-nous ? Que ferions-nous si nous étions dans un couple de gays de 60 ans, qui se sont jurés de rester safe en dehors du couple pour ne pas avoir à utiliser la capote entre eux et puis un jour, un des deux devient séropo, et infecte son partenaire de 40 ans parce qu'il a peur de lui dire qu'il a rompu le pacte ? Après avoir lutté ensemble pendant 30 ans pour ne pas s’infecter l’autre ? Que ce passe-t-il s’il y a un patrimoine commun ? Que feriez-vous si votre partenaire est séropo et qu’il le sait et il ne vous le dit pas alors que vous avez, à de nombreuses reprises, des rapports contaminants? Laissez-moi vous rappeler que l’idée du TasP, précisément, c’est aussi de dire à son partenaire : « Tu sais, on ne va pas mettre de capote même si je suis séropo car je prends une multithérapie et ma charge virage est indétectable depuis 5 ans donc y’a pas de problème ». A un moment du TasP, il faut dire qu’on est séropo, non ? Ou alors vous voulez qu’on arrête carrément de mentionner le sida dans des négociations sexuelles à un moment où les chaude pisses augmentent de 52% en une année ? Comme si ces gonorrhées n’étaient pas un risque aggravant de choper le VIH ?
Mama mia.

13 commentaires:

zezetta a dit…

Sans doute je suis idiote mais j'ai du mal a comprendre le lien entre les augmentations de gonorhees, le Tasp et la criminalisation de la transmission. A part de dire que y a un vrai probleme moral dans la communaute de la part de gens desinvoltes quand aux consequences de leurs prises de risques volontaires.

Mais il peut y avoir plein de raisons differentes pour lesquelles les gens baisent sans capotes, et pas juste le bareback ou pire une volonte de contaminer.

Et le Tasp n'est pas encore la.
Et les gens qui le veulent, veulent certes baiser sans capotes, mais n'ont certainement pas de desir de devenir seropos, sinon ils voudraient pas se prendre un traitement pareil.

Et la transmission du VIH n'est pas forcement le cas de gift givers mais aussi plein de gens qui betement n'arrivent pas a dire qu'ils sont seropos a leurs partenaires, a admettre eux-memes qu'ils sont seropos, ou esperent naivement ne pas contaminer leurs partenaires malgre les prises de risques.

Je crois aussi que la question du bareback est centrale dans la situation epidemio pede actuelle, mais les examples donnes ne s'articulent pas bien je trouve.

Anonyme a dit…

J'aime bien lire Lestrade mais ici il y a beaucoup de mots pour ne pas dire grand chose comme s'il y avait une envie de noyer le poisson.

Le sida est une façon d'agresser les gens mais pas une raison pour agresser les gens. Il doit être répréhensible non pas d'être séropo mais d'utiliser sa séropositivité pour nuire. Après que la justice soit bancale en France.. Ce n'est pas une raison pour ne rien faire.

Madjid Ben Chikh a dit…

Comme toujours, d'accord avec Didier.
J'ai une obsession centrale depuis la fin des 90's quand je parle de ces questions avec des amis, sur des forums ou sur mon blog : ce sont des sujets que nous devons aborder entre gays, entre seropos et seronegs militants, malades et non malades et non militant : ouvert. Entre nous, parce que nous ne nous voulons pas de mal entre nous dans notre communauté. Je redoute le jour ou les heteros s'empareront a leur façon de ces questions, c'est à dire pour nous renvoyer au placard, nous stigmatiser, nous diviser entre les bons gays et les mauvais.
Mais a chaque fois, on se fait traiter de reac, de vouloir culpabiliser les gens, de juger, de discriminer ( alors que dans le Tasp il y a le serosorting, un véritable apartheid sérologique).
Tu as raison d'aborder ces questions avec insistance, Didier. Des fois, on peut penser que tu es un peu trop carré, des fois trop flou... Ce n'est pas la question. Il faut continuer à soulever ces questions. Quand Sarko, Hortefeux et Marine décideront de nous régler notre sort pour gagner des voix à pas cher, au moins, il y aura des gays qui auront un discours à opposer (comme Didier), et les autres qui auront perdu 10 ans de "militantisme" à faire les autruches pour essayer de prolonger la vie de leurs associations désertées et bringuebalantes.
Au passage, ce que tu écris sur la gentillesse et la morale (la base d'une communauté) ainsi que sur notre attitude de Gays des pays riches est bien dit et très juste.

Anonyme a dit…

Responsabilité partagée! 0n ne pas dire aujourd'hui: le sida je connais pas.. TOUT LE MONDE connait sont existence. Je comprends tout à fait ces différences de stratégie nord-sud et de disponibilité de traitements; je comprends que des procès aient lieu lors des rapports criminels (la partouze sous ghb avec infection délibérée) par contre je ne comprends pas que les affaires d'un couple lambda qu'arrivent devant un tribunal, parce que quelqu'un n'a pas le courage de dire à son partenaire qu'il est positif. C'est un moment très difficile pour beaucoup de gens... Aujourd'hui si tu chopes le sida parce que tu n'a pas mis de capote ou t'as pas demandé à ton partenaire de en mettre, c'est ta responsabilité et il faut arrêter de juger les gens! Ca équivaut à se laver les mains sur le positif. La responsabilité est partagée un point c'est tout..la vie est plus complexe que cela. on ne peut pas mettre un flic derrière chaque personne homo ou pas. Comment avoir la tête haute devant un tribunal en se posant en posture de victime parce que t'as pas demandé à ton partenaire de mettre une capote. Combien de fois avant ce partenaire cela c'est produit? Qui me dit que c'est ce rapport là, cette personne là qui t'a contaminé? Combien de fois la victime a été voir ailleurs sans capote? à mon avis il faudrait condamner ces soit disant victimes aussi car il n'a pas que le sida qui tue. Baiser sans capote peut entrainer moult maladies tout aussi graves, mais personne ne le rappelle ou peu! Bande d'hypocrites .. désolé tout ceci est un peu brouillon mais j'aimerais votre avis Mr Lestrade.

Didier Lestrade a dit…

Alors, plusieurs réponses. Zezetta, oui, le lien entre TasP et criminalisation paraît fin, mais justement, il oppose les arguments des pays du nord et ceux du sud. Au nord, une situation de privilégiés qui permet des aménagements de la prévention (enlever la capote dans te ou tel cas) alors qu'au sud, cet aménagement est loin d'être possible. Le TasP existe DEJA, même si les campagnes de dépistage ne sont pas lancées, tu sais très bien que dans le message du TasP, il y a "on est moins contaminant si on a une charge virale indétectable" et ça, ce type d'iinfo, va très vite chez les gays et ils sont déjà en train de l'adopter. Et bien sûr, je sais très bien que l'immense majorié des contaminations, c'est pas du fait des gift givers.

Didier Lestrade a dit…

Pour Anonyme. Je ne suis pas en train de noyer le poisson, j'explique des arguments en prenant la peine de donner des sources pour montrer que je suis pas une folle dérangée qui veut mettre tout le monde en prison. ça n'a jamais été mon propos.

Didier Lestrade a dit…

Et enfin pour Madjid. Oui, on se fait traiter de réac et de personnes stigmatisantes. Et peut-être que la droite n'utilisera jamais les arguments antigays du genre "ils font n'importe quoi". Mais peut-être le feront-ils un jour et tu as raison, il faut en parler entre nous. C'est comme le coût de cette épidémie. Les 7000 personnes en plus qui deviennent séropos chaque année, il faut les traiter, les suivre et tout ça coûte de l'argent. Et ceux qu'on ne dépiste pas et qui tombent malades, ça coûte encore plus. C'est comme les discussions autour du tabac. Et tout ça au milieu de la crise et de la réorganisation de la santé, c'est compliqué.
Merci

Didier Lestrade a dit…

Bien sûr, TOUT LE MONDE sait ce que c'est le sida. Je suis d'accord. D'un autre côté, je peux te prendre n'importe quelle personne et te montrer par A plus B qu'elle ne sait pas ceci ou cela. On va pas aller sortir le cliché des jeunes mais tu crois VRAIMENT qu'ils sont au courant? Plus personne ne lit les pages de Têtu + et l'exemple que je sors sur l'augmentation des chaude pisses de 52%, il n'y a que Illico qui en a parlé. Et les chaude pisses, c'est rien à côté des condylomes.
Donc cette idée du "tout le monde sait ce que c'est le sida", c'est de moins en moins vrai, les gays ont de plus en plus de lacunes sur ce que c'est les petits gestes du sexe pour ne pas se contaminer et l'idée du "on ne peut pas mettre un flic derrière chaque gay", encore une fois, c'est une idée vraiment conne, vraiment dépassée. On ne parle pas ici du "commun" des contaminations, celles qui arrivent tous les jours, celles où il n'y a pas de drame particulier à part la grande merde que représente une nouvelle contamination dans la vie de la personne. Je parle des histoires crades et ne faites pas comme s'il n'y en avait pas, hein. Personnellement, je suis d'accord avec la responsabilité partagée, mais j'ai toujours dit qu'en tant que séropo, je considère ma responsabilité encore plus importante. Comme quand tu as une bléno et que tu es sous traitement, tu vas pas baiser avec un mec parce que tu es hautement contagieux. Ou tu as une angine et tu vas pas faire une partouze. Tu es porteur d'un virus et c'est pas rien, tu agis en conséquence.

Anonyme a dit…

"je considère ma responsabilité encore plus importante" bien d'accord avec ceci, mais je remets une couche sur la difficulté de le dire à ton partenaire. Perso je me protège, je protège mon partenaire seroneg à chaque rapport! Mais nous avons une relation très très libre. Si un jour il est contaminé je ne saurais jamais comment ou par qui... au départ ça m'a pris 15 jours avant de pouvoir lui dire au début de notre relation il y a 3 ans..ça était un enfer dans ma tête ces 15 jours là! Je peux comprendre les gens que peuvent s'enfermer dans la négation du virus pendant longtemps.
Peut être que c'est mon expérience et le sens de ma responsabilité qui m'aveugle.. mais je ne crois pas que les gens sont aussi désinformés que ça, même les jeunes! à part vivre en hermite je ne sais pas où! un minimum d'information passe si tu as une vie sociale!! ok il faut continuer à informer, critiquer le manque de nouvelles campagnes de prévention ou le manque d'articles presse, perso je ne lis plus la presse, mais je reste sur ma position! très complexe ce thème de la pénalisation.
Je voulais juste apporter ici un témoignage de plus sans polémique. plus on parle mieux c'est! keep up!

Madjid Ben Chikh a dit…

@ anomyme.
Ce que tu dis est sense, et ne contredit pas ce que dit Didier (a moins que je me trompe...). Ce que dit Didier depuis des annees, c'est que nous devons avoir cette discussion, et cette reflexion autours de la reprise des contaminations, du relachement des pratiques.
Or beaucoup de gens refusent la discussion tout en developpant des discours Tasp globalement incomprehensibles pour 90% des gays qui concluent rapidement ce qui les arrangent (baiser sans capote). Ceux qui demandent ce debat sont regulierement accuses de stigmatisation. On exclu desormais des victimes, on ne pense plus aux seronegatifs. La responsabilite est partagee, certe, mais un seropositif est comptable de son comportement. Je pense meme que c'est cette petite responsabilite en plus qui lui donne la respectabilite, son droit a avoir une vie sentimentale et sexuelle epanouie, une relation basee sur la confiance.
Le serosorting me rend dingue.
Tout cela doit etre discute entre nous, car il s'agit de notre communaute. Nous sommes redevables aux gosses de 10 ans du monde gay dans lequel ils vont entrer dans 5 a dix ans.
Je pense que l'on pourra garder une attitude ouverte, humaine dans des cas de contaminations accidentelles si nous avons a faire un une communaute responsable ou regne la confiance.
Le serosorting, le Tasp, c'est le debut d'un appartheid entre nous, c'est la fin de la confiance et de l'amour, c'est chacun pour sa gueule. Et c'est beaucoup de tristesse et de solitude pour ceux qui vont avoir a gerer leur seroconversion dans ce genre de machin.
On a les traitements, de plus en plus performants, de moins en moins alienants. On a une connaissance de plus en plus subtile des mecanismes de contamination. Tout est desormais a notre portee pour faire que le VIH ne prive ses porteurs de leur vie amoureuse, sexuelle. Le suivi medical, la faible contamination observee en cas de bonne observance, autant de choses qui doivent rendre le travail de "declaration" plus simple, moins dramatique.
Et voila qu'on remet en cause ce qui nous a protege dans les annees noires, qu'on floute la prevention, en mettant le Tasp comme alternative au preservatif.
Ceux que je plains, ce sont les jeunes sropos d'aujourd'hui. Avec ce genr de morale, personne ne voudra baiser avec eux dans 10 ans (serosorting plus jeunisme).
Et comme je le dis, on finira par avoir un ultra conservatismw, du tea party a la francaise, qui nous rentrera dedans.
On doit avoir cette discussion tout mettre a plat, et cesser l'invective. Didier n'a jamais accuse quiquonque d'etre un salaud de contaminateur. Il a souvent ete accuse de reac, presque de facho parce que depuis plus de 10 ans il reclame une remise a plat et une discussion franche, tout en rappelant que le preservatif est la seule arme efficace.
Anyway,,,
(tiens, c'est marrant, le mot de verification est CABIL... ^^)

Didier Lestrade a dit…

Depuis le temps que je tourne autour de ces sujets, je n'avais pas encore pensé le truc sous l'angle de Madjid : on doit préparer la communauté pour dans 10 ans. Comme les écolos qui disent "il faut sauver la planète pour nos enfants". Forcément, j'y avais pas pensé. Nice one.

Anonyme a dit…

Didier, je reviens de Mars, et je viens de refaire une mise à jour grâce aux liens, merci. Prôner la Capote n’a rien d’un obscurantisme surtout face à la solution TasP.
C’est vrai que la question est légitime dans un couple séropo, mais charge virale indétectable plus traitement ARV, qui par un raccourci logique devrait diminuer les contaminations, c’est un des plus beau sophisme que j’ai entendu. Car quid des réservoirs et sanctuaires du virus, résistances,...
Alors pourquoi pas avec cynisme créer une agence de rencontre, après la description du boy friend désiré, à la place de fumeur ou non fumeur, la fiche devrait mentionner;
recherche : Charge indétectable depuis X années, Traitements ARV x,y,z,… Poussons la logique jusqu’au bout; arrêter le traitement 1 à 2 mois pour faire l’analyse des résistances du virus pour voir si il y a compatibilité pour abandonner la capote.
Le principe de précaution devrait être dans ce cas la règle absolu et intangible, car comme tu l’écrit si 40% des gays ignorent leurs statuts sérologique VIH (sans compter Hépatites, et autres virus), le miroir hypothétique de: PD tous traités = PD épargnés, c’est du n’importe quoi.
Que les IST soient en augmentation n’a rien d’une surprise, suffit de trainer de temps en temps dans des bordels, Sauna, Bar à cul, et vaut mieux pas être allumé, car le Pavlonisme bite + cul = capote, a fait long feu.
Mon cadeau d’anniversaire en Juillet pour 20 ans de cachetons, était certes des CD4 à revendre, mais proposer la préparation d’un pilulier à la place de capote, j’ai du mal à comprendre. C’est du Shadock : pourquoi faire simple, quant on peut faire compliquer !!! Xtophe.

Madjid Ben Chikh a dit…

@ Didier
Notre insouciance, au tournant des annees 70/80, ca a ete les gars et les filles courageux/es des annees 60/70, Stonewall, Harvey Milk, le FAHR, etc... C'est a elles et a eux qu'on doit aussi notre capacite a reagir malgre l'hecatombe dans la deuxieme moitie des 80's. Il n'y a pas de generation spontannee. On transmet des savoir faire, des desirs, des utopies et des pratiques qui faconnent la communaute.
Les acquis (PACS, visibilite accrue, debat sur l'adoption etc9 des annees 90, c'est le resultat de cette prise en charge par nous meme de notre epidemie, et notre capacite, par ACT UP, a les porter dans un debat plus vaste qui touchait d'autres pans de la societe comme les hemophiles.
Ce qui se passe de nos jours me desole car c'est le visage de la communaute de dans 10 ans que nous faconnons. Incapable de se prendre en charge, de se distraire, d'etre exigeante avec elle meme, ambitieuse.
Le mariage et le TASP pour seuls horizons. Le repli sur soi de chacun, derriere l'ecran ou dans les bordels, et des cachets avec une grosse lampee de gel pour oublier la capote. Et cette abomination du serosorting. Pauvres gamins...
Deja, aujourd'hui, avoir 20 ans et trainer dans un crassoir, Depot ou autre... Tiens, voila une idee de mobilisation. On veut de beaux endroits ^^ Avec des boys en costumes d'anges qui distribuent des preservatifs dans les escaliers. Des labyrinthes fleuris en semiplein air eclaires a la bougie pour les plus presses, et des bosquets abimes pour ceux qui veulent quand meme etre regardes, une piste de danse en salle voutee entouree de salons tres tres tres tamises ou des garcons habilles comme des anges vous apportent votre consommation avec un preservatifs -les plus abstinents en remplissant ainsi leurs poches... Des ecrans internets un peu partout, avec la possibilite de faire des jeux de boy piste entre ordinateur et iPod, "je suis blond et ne danse que sur Madonna, retrouve moi", etc... ^^