mardi 20 juillet 2010

C'est le moment


Il est temps de couper à ras toutes les alchémilles après leur floraison pour provoquer la pousse de nouvelles feuilles tendres et toutes fraiches. N’ayez pas peur de tout couper à la base, certains jardiniers disent qu’on peut même passer la tondeuse dessus quand on a un grand massif. Il suffit de les arroser un bon coup pour relancer la pousse, et encore, souvent les alchémilles se débrouillent toutes seules, ce sont des vivaces sauvages après tout. Profitez-en pour récupérer les tiges de fleurs, même quand elles sont grillées par le soleil, enlevez les feuilles latérales et ne gardez que les inflorescences pour en faire des bouquets que vous mettrez dans un coin au sec du jardin ou d’une remise, avant de les sortir sur une table en plein hiver, dans un pot solide. Un seul bouquet de ce genre peut illuminer un coin du jardin tout triste pendant l’hiver.
Il y a encore pas mal de gens qui n’osent pas faire des bouquets secs avec des graminées. On a tous été tellement marqués par les mémés à travers le monde qui confectionnent des bouquets d’immortelles et de graminées si laids que pendant longtemps l’idée même donnait de l’urticaire. Mais c’est fini tout ça et c’est le moment de faire ces bouquets à partir de tiges de graminées qui abondent dans les jardins et la nature en ce moment.
Mettez-vous à l’ombre d’un arbre (ou alors restez au soleil bande de folles SM) avec toutes les coupes de tiges et enlevez toutes les feuilles secondaires pour ne garder que l’inflorescence sur une longue tige. Je parlais des clichés des immortelles. Mais c’est super joli pour obtenir des effets de masse avec ces fleurs. Les deux premières années après mon arrivée à la campagne, j’en ai semé beaucoup dans le champ de cosmos. Vous pouvez les piquer avec une épingle sur n’importe quel support, comme pour les corsos fleuris, mais avec des motifs plus funky comme si vous vouliez faire plaisir à un fagzine. C’est le moment de couper les tiges fleuries de thym et de marjolaine, que vous mélangerez avec tout ce que vous trouvez, comme les chardons, des eryngiums. En ce moment, les stipa tenuifolias sont trop lourdes de graines, certaines penchent vers le sol : rasez tout à 10 cm du sol et faîtes un beau bouquet, tel quel, dans un vase. Pour moi, les vrais bouquets secs devraient être montrés au cœur de l’hiver, quand les graminées ont le plus d’effet. Un gros bouquet sur une table de jardin, à l’extérieur, en plein froid et sous le vent, cela fait un super effet. Bien sûr, il faut les protéger de la pluie car les tiges sèches se décomposent très vite, mais même sous un arbre comme un cèdre, cela procure un focal point qui reste joli pendant plusieurs semaines des mois tristes de l’hiver.
C’est le moment de commencer les boutures. Tout le monde sait qu’il faut attendre août, quand les tiges sont bien aoutées, mais il y a plein de variétés de plantes qui peuvent être bouturées dès maintenant car on ne peut tout simplement pas les rater. C’est le cas des sauges officinales. Comme les lavandes et le romarin, les sauges font de très beaux massifs de bordure, le long d’un chemin. Sans soin, elles se marcottent souvent toutes seules en traînant sur le sol. Il suffit de prendre les tiges, enlever les feuilles secondaires, réduire de moitié des dernières et mette ces tiges dans un pot avec n’importe quelle terre, le sable est parfait, en disposant ces tiges sur le bord du pot. Et mettre ça à l’ombre, dans le coin du jardin le plus frais.
C’est le moment de tailler les arbres en vert, ce qui veut dire quand les feuilles sont toujours là, au milieu de l’été. Les arbustes et les arbres ont tendance à trop pousser, il faut réduire leurs tiges pour ne pas les épuiser, surtout lorsque les orages insistent pour passer au-dessus de nos têtes sans apporter de l’eau (comme ça se passe chez moi, pas de vraie pluie depuis un mois et demi). Avoir moins de branches et de feuilles à nourrir repose l’arbre ou l’arbuste pendant les moments durs de la sécheresse.
C’est aussi le moment de couper les haies à la cisaille ou au taille haie et de laisser les coupes sur le sol pendant quelques jours pour qu’elles sèchent au soleil avant de les ramasser. Plus sèches, elles seront plus légères à manipuler (quand les haies sont grandes) et les jeter au compost, les broyer ou les brûler. C’est donc le moment de broyer les longues tiges de bois, ou de les couper pour faire des fagots. Là aussi, tout doit être fait à l’ombre à moins d’être vraiment maso.
C’est le moment de ramasser des graines pour en donner aux amis. Là je ramasse les ancolies en même temps que je les rabats au pied, leurs feuilles d’été étant presque grillées par le soleil. Comme les alchémilles, les sauges pratensis et les œillets nains, ou les œillets de poète. Dans certains coins du jardin il y a encore des graines de muscari dans les tiges séchées, les graines de primevères veris. Toutes ces graines prennent bien, sont faciles à semer.
C’est le moment de réduire les rues (avec des gants car c’est très toxique) pour leur donner une forme bien ronde et ramasser les tiges pour en faire des petits fagots suspendus dans la cabane pour éloigner les insectes et les souris. D’ailleurs, s’il y a un moment pour ranger et nettoyer la cabane, c’est bien maintenant. Si quelqu’un a envie de m’aider et passer une journée à tout sortir et dépoussiérer et ranger cette cabane qui est remplie de bordel depuis deux ans, feel free to ask.
C’est le moment d’aérer les fruitiers en espaliers pour dégager les feuilles qui cachent les fruits. Couper ces feuilles permet d’aérer les pommes et les poires, les exposer au soleil. Il faut contrôler la vigne et, là aussi, dégager les grappes de raisin pour les exposer au maximum au soleil. Traiter une dernière fois avec de la bouillie bordelaise.
C’est le moment de donner de l’engrais à tout le monde, sauf aux graminées. Avant le mois d’août, les plantes sont arrivées à maturité et elles se sont déjà épuisées à pousser. Comme il fait très sec, il faut très bien arroser un premier soir, noyer presque les plantes et les arbustes. Puis on arrose à nouveau le lendemain avec l’engrais, de manière à ce que celui-ci ne brûle pas une plante assoiffée. S’il reste du compost, c’est le bon moment aussi car cela ajoute du mulch, mais je ne le fais jamais quand il fait trop chaud comme en ce moment.
Aussi c’est le moment de passer en vitesse dans les jardineries pour voir les fins de stock. A la fin juillet, plus personne n’achète de fleurs pour le jardin car les gens ont trop peur (avec raison) de planter par de grosses chaleurs. Il y a donc des soldes impressionnantes, et même les espèces rares sont bradées pour rien. Pour 10 euros, j’ai acheté 10 plantes toujours en bonne santé, des primevères denticulatas qui en général valent au moins 4 euros pièce et des Phalaris qui font facilement 5 euros. Les rosiers sont bradés aussi. Il suffit de les acheter, les entreposer dans un coin frais du jardin avec de l’eau, les garder au repos avant les plantations de septembre. Pour le godets, ne les plantez pas en pleine terre (trop dangereux), mais donnez-leur chacun un pot plus grand, de quoi patienter avant la plantation définitive en octobre. Vous aurez alors, pour 1 euro, une vivace qui aura pris la taille d’une plante qui vaudra presque 10 euros.
Enfin, c’est le moment de commander du bois et le remiser. Rassemblez à l’abri tous les tas de bois qui ont été accumulés sur place aux quatre coins du jardin. Avec la chaleur, ils sèchent à grande vitesse. Faites des fagots avec les branches coupées des haies (charmille, hêtre). Toujours faire des fagots. Et quand vous faites tout ça, regardez autour de vous, c’est calme, et vous verrez, la conférence de Vienne est loin, et l’affaire Bettencourt aussi, et toute les magouilles du monde glissent et s’évaporent et si vous y pensez malgré tout, c’est pour mieux trouver votre point de vue, tout seul, comme un grand, sans avoir besoin d’Internet ou des chaînes infos.