Après tout le délire sur la sortie de l'album
des Daft, je me demande s'il ne serait pas temps d'aborder leur travail sous
l'aspect de la neuro-science sociale. Oui, je sais que c'est un domaine à la
mode où on arrive à faire dire n'importe quoi dans tout ce fatras d'études
cogno-scientifiques dont les Américains sont particulièrement friands. Un
article du NYT, "Popneuroscience under attack" parlait précisément de cette batardisation du
"porno cérébral" par les écrivains à succès comme Malcolm Gladwell.
Il est courant de voir les médias résumer et embellir des résultats des études
scientifiques, surtout sur les liens entre le fonctionnement du cerveau et ses
conséquences altruistes.
Mais après tout, les Daft sont supposés être un duo
de faux cyborgs et leur dernier album s'appelle Random Access Memories donc nous sommes en plein cœur du sujet.
Comment les souvenirs influencent, excitent et déforment notre attrait pour la
musique. Il est donc peut-être temps d'aborder leur disque sous l'angle de ce
qui se passe dans le cerveau quand on l'écoute.
Etant donné que cet album, encore une fois, ne
prend absolument pas en considération l'incroyable crise mondiale qui nous
entoure, comme si la musique des Daft prenait son origine sur les belles
collines de Los Angeles où Thomas Bangalter a sa maison (et où Guy-Manuel de
Homen-Christo a rangé sa Porsche), il faut bien chercher la valeur intrinsèque
de ce disque si attendu dans les profondeurs du mental. En ces périodes
difficiles, la pop se débarrasse de toute profondeur militante, disait déjà en 2011 Jon Pareles. Nous sommes
entourés de disques qui réduisent le besoin de concentration du public: c'est
la loi du tube de 3 minutes avec deux idées parce que les jeunes ont trop
d'information à digérer pour trop peu de temps disponible. Dans ce sens, les
Daft se situent plus que jamais dans un monde immatériel, à mi-chemin entre la
chambre et le seul endroit qui a encore du prestige, le club, ou plutôt sa partie
V.I.P. En choisissant cette place, sans trop d'affect dramatique, sans
engagement, sans description du monde moderne tel qu'il est, comparé au monde
moderne du début de leur carrière, les Daft rejoignent ce que dit le critique
de musique Steve Almond quand il réalise que son métier n'est plus nécessaire: "J'en suis venu à définir un concept que j'appelle le Paradoxe du Critique
Musical : le simple fait que même les meilleurs critiques, ceux qui,
contrairement à moi, ont de l'entrainement et du talent, ne parviennent pas à
commencer à comprendre ce que cela veut dire d'écouter de la musique. Car écouter de la musique est un processus
collectif. Les fans ne restent pas là (comme les critiques le font) en train de
découper en tranches l'intérêt d'une chanson. Ils apportent à chaque chanson
leurs propres besoins émotionnels, leurs désirs et leur tristesse, leurs
espoirs et leurs cœurs brisés. Suis-je en train de suggérer que la critique
musicale est un exercice qui ne sert à rien?
Oui, je le crois".
Pour moi, les Daft utilisent cette désaffection
mentale de la musique exactement comme les corporations utilisent notre perte
d'espoir en un meilleur futur. C'est un deep learning qui vient des ordinateurs
qui sont conçus de plus en plus pour penser comme nous - et donc nous
apprennent à penser comme eux. Les Daft ont toute l'intelligence pour créer
l'hymne de la révolution que les 5 continents attendent. Les Daft ont aussi ce côté
rugueux, imprévisible, érudit. Il n'y a vraiment rien qu'ils ne puissent
accomplir. A 40 ans, ce duo "arafo" pourrait enfin satisfaire ce que
j'attendais d'eux, moi un "arafaifu" (autour de 50 ans), prouver
qu'ils vieillissent dans le bon sens du terme. Montrer de l'affection pour les
autres. Prouver qu'ils développent leur comportement prosocial à travers des
actions qui aident les gens. Il y aurait pu avoir toute une théorie, tout un
angle dans cet album qui aurait enfin montré que les Daft pouvaient contribuer
d'une manière altruiste au monde. Essayez de lire cet article sur comment une chanson peut vous faire pleurer.
Un exemple. Avant même que l'album sorte, j'étais
persuadé que le succès serait tel qu'il changerait le cours de l'été 2013. Cet
été aurait pu être le second été de la French Touch. Avec toute une série de
tubes collés les uns aux autres, Daft Punk aurait pu entraîner dans leur comète toute une nouvelle génération d'artistes français vers l'international.
Finalement, trois mois après la sortie de l'album, il est évident que l'été
2013 ne sera pas un été particulièrement Daft. OK, un énorme tube mondial avec
Get Lucky, mais la suite? C'est vraiment pas le raz-de-marée que j'avais
imaginé.
Et donc on peut imaginer que les Daft ont fait
un mauvais pari. Leur album était foncièrement mental, même s'il est enregistré
avec des vrais instruments. En 2013, nous sommes au sommet de
l'Existenzmaximum, le phénomène apparu dans les années 80 avec le lancement des
appareils portables, le Walkman, et depuis les iPods, les casques qui vous protègent des bruits extérieurs et les autres produits digitaux qui nous permettent de
vivre cloisonnés des endroits publics les plus sonores. Et les Daft ont raté
cette occasion de cristalliser ce moment unique de notre culture en créant quelque
chose qui soit vraiment dans leur domaine, celui de la neuroscience.
L'album
J'étais si prêt à aimer Randon Access Memories que j'avais décidé de l'acheter pour de
vrai, le CD et tout. C'est l'objet que je voulais, pour lire les crédits et
regarder la pochette en détail, ne pas se contenter d'un achat iTunes. Avant
que l'album ne sorte, je le défendais déjà dans les discussions. Mon point de
vue était simple: quand les Daft travaillent avec Giorgio Moroder ou Nile
Rodgers, je ne vais pas bouder mon plaisir.
Le jour de la sortie de l'album, je suis allé
au supermarché pour faire les courses et... j'ai oublié de l'acheter. Pourtant,
ramener les Daft de Carrefour, je trouvais ça assez cool, même au troisième
degré. Et puis un ami était chez moi, il avait téléchargé l'album et pendant le
weekend, j'ai refusé de l'écouter. Je tenais vraiment à le découvrir en CD.
Finalement, par facilité, un moment d'ennui et de spleen et je me suis dit
"Bah tant que tu es là, ce serait vraiment stupide de ne pas
l'écouter".
Je sais très bien que certains albums
nécessitent plusieurs écoutes pour vraiment pénétrer dans votre cortex intime.
Mais je connais les Daft et ils ont toujours cette approche instantanée, right in your face, on comprend tout de
suite ce qu'ils veulent dire, ce qui est une qualité dans ce monde de folles
qui se triturent l'esprit à chaque fois qu'elles ouvrent une bouteille d'eau
minérale. J'étais dans un état d'esprit vierge, prêt à me laisser surprendre,
prêt à découvrir n'importe quoi même la plus grande hérésie musicale, même une
éjaculation faciale, c'est pour dire.
Disclaimer aussi: je sais que Random Access Memories a été promotionné
d'une manière parfaite mais cela ne m'influence pas du tout, dans un sens ou un
autre. Les Daft avaient déjà fait le coup pour le BO de Tron et c'est la moindre des choses quand on a 25 avocats
(estimation à la louche) qui travaillent pour le groupe. Le plan média des
Daft, c'est comme la promo de la nouvelle console Nintendo, je m'en fous
totalement. Donc pas de méchanceté ici sur le pouvoir de la machine
commerciale, ça ne m'intéresse pas du tout.
1) Give
Life Back To Music
Donc le premier morceau comporte une vraie
intro avec fanfares et trompettes et tout de suite, on est en terrain conquis,
un groove comme on aime, Nile Rodgers dès l'ouverture d'un titre qui ne dit
qu'une chose: c'est notre maison, elle est immense, il y a des escaliers larges
de 4 mètres et une vue fantastique sur Los Angeles, voici Sofia Coppola sur la
gauche, il y a des gens qui s'amusent et rigolent et on les entend dans le
titre, un des effets musicaux que j'adorais dans Rappin' de Kurtis Blow (la version longue fait 8 minutes et l'instru, j'en parle même pas) mais là ça ne dure que 10 secondes. Ce
morceau est une intro et une note d'intention, je vous dis. Là, dans mon
esprit, je met un caillou de côté.
2) The Game of Love
Premier bon morceau et le second me fait
rigoler intérieurement, je vois qu'on est dans le registre du midtempo avec des
paroles sentimentales et je comprends que les Daft ont envie de parler perso,
de montrer leur côté fragile parce qu'ils ont vieilli et forcément les
histoires d'amour affectent les robots privilégiés aussi, ce n'est pas moi qui
vais les critiquer quand ils pleurent en public. Le Game of Love et le rejet
sont le fond de commerce de la composition musicale et les Daft n'ont plus peur
de s'y aventurer. Ce deuxième titre est parfait pour ce qu'il est: "Je
suis la deuxième chanson de l'album et je vous prends par la main pour aller
dans une chambre de la grande maison pendant que Sofia et les autres s'amusent
en bas et sur la terrasse". I love it. Deuxième caillou.
3) Giorgio
by Moroder
Moroder apparaît enfin et, well, j'aurais fait
la même chose si je devais faire un disque avec lui. Laisser parler un vieux
monsieur qui n'a jamais parlé. Je ne crois pas que je l'aurais fait parler sur
cet aspect de ses souvenirs mais l'idée est touchante, il parle de ses débuts,
de l'étrangeté de la découverte de la disco quand on est soi-même l'inventeur.
Bien sûr Philippe Doux-Laplace n'a pas pu s'empêcher de pondre un tweet très
drôle en disant, je résume: "Je me demande si ça aurait été mieux si
Moroder avait raconté la liste de ses commissions au supermarché, dans le genre
du monologue qui dure dix heures, qui commence dans les années 60 pour terminer
par Ne pas oublier le café et le poivre,
et tiens je me demande s'il reste des Springles. Quand la voix revient à
5:15 sur le thème musical très banal quand on pense à ce que Giorgio aurait pu aider
à pondre, il y a un très joli break et puis après ça vire à du Craig Amstrong
puis Air avec de vraies batteries et là mes sourcils froncent même si je
comprends très bien pourquoi ils ont fait ça, c'est pour donner du Ommph live
mais ce batteur en fait trop, ça sent le requin de studio à 1000 nautiques à la
ronde et franchement, je m'en fous si le mec est connu parce que c'est même pas
un jeu de batterie très raffiné, il me semble que Jean-Michel Jarre pointe son
nez dans le studio pour pousser Moroder dehors. Et puis ensuite ce solo de
guitare de merde. Non mais les mecs, on est sur les platebandes de Moroder,
c'est pas Cerrone quoi. Bref, j'avais déjà mis un caillou de côté parce que
j'étais fan de Moroder avant que les Daft soient nés mais cette fin est
tellement naff que le caillou est jeté au compost de mon jardin.
4) Within
Intro comme du Frankie Knuckles circa 1995 et
donc je dis chapeau mais après ça tourne à François Feldman avec une mélodie
tellement rance que perso ça m'aurait fait mal de sortir un truc pareil sous
mon nom. Je me dis "Bon les Daft ont vraiment envie de nous montrer qu'ils
sont humains, ce qui est OK, mais la phrase "I am lost - I even can't
remember my name" est si dodgy que ça va finir en slogan de surmoi pour Tumblr,
faut être vraiment en delirium pour ne PAS se rappeler son propre nom et Manuel
de Homen-Christo je crois que tu te rappelles très bien de ton nom donc fais
pas semblant de faire la bipolaire, la folie mentale est un sujet sérieux, et
la solitude aussi, arrête de faire croire aux kids qu'à 14 ans c'est super cool
de ne pas se rappeler son nom. "Mais Maman, je t'assure, je suis si
perduuuuuuuuu que je ne me rappelle pas mon nom!" Un caillou dans la poubelle.
5) Instant Crush
Ca commence comme du Lio qui ferait une
autopsie chez "Les Experts" mais je respecte, je suis en train de
comprendre que l'album est mou fait exprès, on est dans l'easy listening et la
muzak et God Knows que je n'ai rien contre ça mais pour moi les Daft sont un
groupe qui arrache en live et je me demande quand même quel est l'apport ici
des Daft quand on a déjà Todd Rundgren et Steely Dan. Et pof encore un solo de
guitare, la marque du méchant requin de studio: il en donne une autre couche au
cas où on aurait pas pigé la première fois. Tout ce qui nous a dirigé vers la
house en 1986, c'était précisément de ne plus entendre de solo de guitare EVER,
c'est pour ça qu'on aime les synthés les mecs mais forcément, ça vous excite à
un niveau pervers de mettre un deuxième solo de guitare, vous devez
probablement être en train de rigoler comme des fous dans le studio
d'enregistrement "Waou on est en plein déliiiiire, fais-nous un solo de
guitare mec". Encore un caillou dans le broyeur SFA (j'en ai pas, c'est pour faire un petit gag).
6) Lose
Yourself To Dance
C'est parfait. Une idée dans le morceau et
c'est génial. Je garde mon caillou.
7) Touch
Ca commence comme du Spielberg sous Quaalude donc je dis oui. Sweet & camp, nice, belle intro qui nourrit le suspense, rien, de renversant, on dirait du FSOL et je me dis "OK, il fallait ça dans le melting pot de l'album, il faut dire que Paul Williams est là pour faire un featuring qui peaufine le calcul mathématique du disque en termes de cross-over et tout est beau jusqu'à 3:20 où on est en plein Savannah Band et Cherchez la Femme, un peu de Dixieland ne fait jamais de mal surtout avec des vrilles de synthés et finalement, c'est le morceau le plus classe de l'album, les arrangements de violons et de coeurs sont super, je n'ai rien à dire, la construction du track, mélange plein d'idées dans un mash-up qui est exactement ce que l'on peut attendre des Daft quand ils jouent à Lou Reed dans Goodnight Ladies. Quatrième caillou.
Ca commence comme du Spielberg sous Quaalude donc je dis oui. Sweet & camp, nice, belle intro qui nourrit le suspense, rien, de renversant, on dirait du FSOL et je me dis "OK, il fallait ça dans le melting pot de l'album, il faut dire que Paul Williams est là pour faire un featuring qui peaufine le calcul mathématique du disque en termes de cross-over et tout est beau jusqu'à 3:20 où on est en plein Savannah Band et Cherchez la Femme, un peu de Dixieland ne fait jamais de mal surtout avec des vrilles de synthés et finalement, c'est le morceau le plus classe de l'album, les arrangements de violons et de coeurs sont super, je n'ai rien à dire, la construction du track, mélange plein d'idées dans un mash-up qui est exactement ce que l'on peut attendre des Daft quand ils jouent à Lou Reed dans Goodnight Ladies. Quatrième caillou.
8) Get
Lucky
C'est le morceau dont la mélodie vous apparaît
régulièrement au réveil. C'est l'effet tube de l'été 2013, le morceau est
tellement sublime qu'il est devenu un earworm planétaire. C'est la fusion
parfaite, sans excès, du passé et du présent et je suis simplement content,
pour la première fois de cette écoute et j'adore tout: le groove, les paroles,
la douceur du morceau qui colle à l'irrésistible envie de se lever qu'il
procure, ça vous fait rêver au mec qui danserait avec vous dans le salon ou
partout où il vous emmènerait, c'est la chanson typique "C'mon & get
my love baby" et les vocaux sont tellement sexy. C'est un classique
moderne, no doubt. Le genre de morceau qui rassemble tout le monde, les kids de
15 ans comme les vieux de 60 ans, c'est limpide, sincère, gentil, généreux,
everlasting. Bravo les mecs.
9) Beyond
Franchement, c'est bien de A à Z. Intro grandiloquente,
filmique. Hitchcock groovy quoi.
10) Motherboard
C'est mignon. Mais c'est de la muzak.
Admettez-le.
11) Fragments of Time
Je commence à fatiguer. I'm loosing it, je sais
très bien que c'est ce genre de mélasse que vous avez envie d'entendre sur la
Route 66 ou la D676 entre Bergerac et Monflanquin mais je pose la question: c'est
quoi l'idée derrière tout ça? Je n'arrête pas d'imaginer la gueule des Daft en
studio, du genre "Yeeahhhhhh encore de la pedal steel guitar mister!!!!
Man, on est tellement wasted avec notre Coca Light qu'on vit à 100 à l'heure.
C'est donc ça l'alternative à Rihanna et Pitbull? Je ne crois pas. Encore un
caillou jeté à la mer, bien loin, bien profond.
12) Doing
It Right
Oui, c'est bien, vraiment Daft comme il faut
avec un rythme pédestre électro légèrement pressé dans le genre "Si je
veux m'acheter cette montre à 1800 euros chez Colette, c'est NOW avant que ça
ferme d'un autre côté je suis millionnaire et je peux avoir la boutique ouverte
à 23h rien que pour moi comme Elton John, la crise c'est pour les autres bébé,
pas pour les Daft". Patrick Thévenin a cette théorie selon laquelle cet
album est parfait parce qu'il prend tout le monde à contrepied et il a raison,
je vois très bien ce qu'il veut dire, c'est un geste d'indépendance par rapport
aux attentes et c'est là où la répétition de cet album fonctionne avec ces
vocaux qui hachent les notes les unes après les autres et le bourdonnement des
boites à rythmes, un morceau sans excès, vraiment très joli, une matrice pour
plein de remixes merveilleux à venir. Je garde ce caillou SVP.
13) Contact
Les voix des cosmonautes regardant la Terre ne
constituent PAS une idée originale, mes chers adolescents trainspotters, mais
c'est très agréable quand on aime la SF et ce que ça veut dire. Ce qui commence
comme un joli track de synthés va bientôt être méthodiquement détruit par ce
putain de batteur relou qui prend toute la place. Dans l'histoire des (mauvais/pléonasme)
groupes de rock de baloche, il y avait toujours le batteur connard qui tape comme un branque et qui éclipse tout le monde, dans le genre Vander de Magma
mais en beaucoup plus beauf. Je crois que les Daft ont la nostalgie de cet
aspect bourrin du rock et je ne leur en veux pas, ils étaient juste trop jeunes
pour connaître à quel point c'était avilissant, tous ces solos de batterie
pendant les concerts. On se dirige vers la fin de l'album, un morceau qui
préfigure très bien ce que pourrait être la fin de la prochaine tournée des
Daft, et je m'en fous s'il n'y a pas de tournée, çà ce stade je suis en train
de perdre mon intérêt. Ce n'est pas que cet album ne ressemble pas à celui que
j'avais imaginé dans mon esprit retardé de vieux mec qui vit à la cambrouse et
qui n'a jamais discuté avec Sofia C, ce qui je suis en train de réaliser, c'est
plutôt que cet album n'est PAS un CD que j'aurais voulu acheter en vrai.
Résultat: 7 morceaux que j'aime sur 13. Et
pourtant, je ne suis pas difficile. Sur la musique comme dans le sexe ou les
films d'action, je me contente de peu car il faut toujours être heureux d'avoir
juste ce qu'il faut. Un album qu'on aime à moitié, pourquoi pas? Mais si
l'autre moitié vous irrite au point de faire fast forward afin de sauter 6 titres c'est énervant. J'étais prêt pour cet album, prêt à mettre de côté
toutes mes considérations politiques et éthiques pour n'écouter que la musique,
commencer une page neuve, atteindre un niveau de convergence harmonique avec
les Daft - après toutes ces années. Finalement, même si je comprends chacun de
leurs gestes, je ne vois toujours que deux hommes aisés qui ne sont pas
du tout attentifs à ce qui se passe autour d'eux. Ils ont presque 40 ans tic
tac et parviennent toujours à se projeter dans le monde des kids, ce qui est déjà très
bien mais I KNOW TOO MUCH et eux aussi savent tout ce qu'il faut savoir sur la
musique et je ne trouve pas chez eux cette impression de découvrir quelque
chose qui arrache et qui soit présenté d'une manière instantanée, comme quand
j'écoute les mixes de ART Department.
Je m'entends réfléchir quand j'écoute les Daft
alors que je ne devrais entendre que leur musique. Et j'en ai marre d'entendre
la musique moderne tout en visualisant le wall chart de toutes leurs
influences. "Alors ce son vient de là et celui-ci c'est complètement 1967
et ces synthés c'est 1987 à donf et ainsi de suite". J'aimais ce procédé
intellectuel avant parce que ça me donnait l'impression d'être intelligent mais
ça ne m'intéresse plus du tout aujourd'hui. J'aime les artistes qui ont cette
connaissance et qui trouvent un moyen de faire oublier leur technique et les
grosses ficelles de leur comportement. Les Daft Punk sont encore très loin de
ça. La musique conceptuelle, c'est bien pour les étudiants en école de commerce
un peu originaux, mais pas pour moi. Je veux m'oublier dans la musique et cet
album y parvient sur quelques titres, c'est un verdict très décevant.
Pourtant, j'étais vraiment vraiment vraiment
prêt.