C'est en discutant avec des amis que je réalise à
chaque fois que les habitudes du jardinage se sont déjà perdues et que les gens
rêvent de savoir comment ça se passe, comment il faut faire. Vous donnez un
conseil tout simple de traitement par pulvérisation contre des maladies des
rosiers et vous partez du principe que tout le monde sait ces trucs
élémentaires. Mais souvent un grand silence répond à votre discussion
téléphonique ou un regard interrogateur apparait sur le visage de cette
personne. On ne comprend pas ce que vous dites. C'est particulièrement vrai à
Paris, par exemple. Avec tous ces jardins sur les toits et ailleurs, on
pourrait s'imaginer que les gens sont assez érudits pour s'occuper de leurs
plantes.
Donc ce qui me paraît évident m'empêche d'écrire
dessus car j'ai toujours l'idée que tout le monde connaît les gestes
élémentaires et surtout que mon interlocuteur sera meilleur que moi. C'est un complexe de mec qui a grandi à la campagne. Je
m'empêche d'écrire sur ces sujets car ce sais qu'un jardinier (pas plus loin que
derrière ma haie d'ailleurs) s'exclamera en lisant ce blog : "Mfgrrrr mais on sait ça
depuis TOUJOURS (quoi)!".
A part que tout le monde n'a pas un blog rococo
aussi cool que le mien. Alors je répète ma proposition : ne serait-il pas temps
pour une revue, quelque part, de consacrer une chronique sur ce qu'est un
jardin, sortir du "How To" tout en y revenant régulièrement, expliquer
pourquoi on rêve d'avoir un jardin quand on n'en a pas, pourquoi c'est si
excitant quand on en a un, qu'est-ce que ça apporte, pourquoi jamais jamais jamais dans la presse du
jardinage on ne parle de ces moments qui "cimentent" l'amour du
jardinage, quand on se relève de 3 heures d'épandage de compost dans les
massifs et qu'une brève rafale de vent traverse le jardin, une odeur vient des
champs ou d'un feu alentour, et puis il a cette étrange lumière qui vient du
fond de la vallée, la cloche du village vient de sonner, le jour d'hiver est en
train de tomber, il fait encore bon, et cet attroupement de myscanthus really looks good this year, vous vous
sentez bien dans le silence. Et le compost, à vos pieds, sent bon. Le rouge
gorge est juste à deux mètres et il vous regarde.
Ce sont ces moments abstraits qui réveillent notre
esprit lorsque l'on jardine et que l'on regarde son jardin, le cerveau est sous
hypnose très très légère, c'est juste la concentration du travail bien fait.
C'est comme quand on sculpte ou qu'on peint, mais dans ce cas précis on est
face à la nature qui entre littéralement dans votre jardin, que ce soit une
terrasse sur un toit, un tout petit jardin dans une cour ou un grand espace à
la campagne. Le ciel, le temps, les oiseaux, les parfums, les graines, tout
bouge d'un jardin à l'autre. Même dans ces affreux non-jardins du tissu
périurbain, comme on dit, tout bouge.
Ce qui nous ramène au traitement pour les rosiers.
En ce moment, avec la chaleur qui revient après deux mois de pluie, les jardins
sont attaqués de partout. Les plantes ont leurs parasites bien à elles, vous
voyez des pucerons sur les dahlias et les armoises, même sur certains houx, et
bien sûr les rosiers. Et vous n'allez pas vous laisser faire. Chaque journée
compte contre les petites bêtes donc vous allez chercher ce pulvérisateur et
non, je ne vais pas vous dire lequel acheter sinon on n'en sort plus. Pour les
bêtes et les maladies, je conseille un produit écolo de Carrefour (donc pas
cher) pour maladies des rosiers. Je ne vais pas vous donner la référence, ça
serait grossier, et de toute manière il n'y a pas tant de produits écolos chez
Carrefour dans cette indication.
Je l'aime bien ce produit parce qu'il est
blanchâtre. C'est un liquide assez épais qui marque bien les feuilles avec une
bonne adhésion. Il est très facile à diluer donc on n'a pas besoin d'en mettre
beaucoup. L'avantage de ce produit, c'est de bien marquer les feuilles d'un
voile de blanc. Pourquoi? Parce que vous serez sûr que vous allez ainsi traiter
effectivement toutes les feuilles et les branches des arbustes, inside out. Cette peinture blanche sera
bien efficace quand vous aurez commencé de traiter un poirier sur espalier;
vous croyez avoir tout pulvérisé l'ensemble de l'arbre mais non, il manque
cette branche, juste là, qui n'est
pas blanche donc ça veut dire que c'est pas fini. Il ne sert à rien de pulvériser
vos plantes si vous laissez le même foyer infectieux SOUS les feuilles (en
général, c'est là que les bébètes se cachent).
Le fait que votre arbuste soit blanchâtre peut
enlaidir votre jardin pendant une semaine. Ou deux si c'est sec. Oui, un jardin
naturel ne devrait pas être marqué par un produit phytosanitaire. Mais
rappelez-vous les jardins des vieux fermiers : les plantes étaient toutes
bleues, surtout les vignes, parce que l'on utilisait beaucoup la bouillie bordelaise. Souvent, à l'époque, cette couleur bleue se voyait sur les murs sur
lesquels poussaient les vignes. C'était joli, c'était très sixties. Et puis,
une bonne averse d'été nettoiera tout ça et pendant ce temps, vous aurez
administré un traitement complet pour quasiment tout. Hortensias, buddleias,
cornus, pruniers et fruitiers, tout est à traiter d'URGENCE car tous sont en
train de pousser. Dans le nord de la France, avec toute cette pluie, le jardin
n'arrête pas de grandir. Les rosiers remontants sont à leur deuxième ou troisième vague de floraison, les
grimpants lancent de grosses tiges, tout ça est fragile.
Donc, rappel : regardez la météo. Il n'y a rien de
pire que les gens qui pulvérisent leur jardin avant la pluie et tout ça, en
plus de la pollution et du temps perdu, n'aura servi à rien. Si vous savez qu'un gros orage
arrive, des fois l'impact de la pluie suffit à éliminer une grande partie des
pucerons et autres bêtes. Traitez ensuite (s'il ne pleut plus hein!) car les
pucerons qui restent sont un peu groggy, c'est le moment de les exterminer pour
de bon. Toujours pulvériser le dessous des feuilles, même si c'est chiant. En
fait, mon idée, c'est que le processus est plutôt jouissif. We kill bugs. Et ceux qui utilisent les
insecticides et engrais naturels à base de purin d'orties ou de prêle ont le
même plaisir en tuant toute cette vermine qui menace le beauté de votre
hortensia Annabelle.
Et si vous détestez pulvériser vos plantes, il vous
reste toujours la possibilité de faire un jardin avec uniquement des plantes
qui n'ont jamais de maladies. Ah bon, ça existe? Bien sûr, oui ça existe
patate. Je peux écrire sur ça aussi. Je peux vous faire des pages et des pages
sur le pour et contre de l'éclairage dans le jardin avec toutes ces nouveaux
systèmes de LEDS qui arrivent. Ou pourquoi n'importe quel jardin doit avoir une
vista. Ou comment faire quand le gel est en train de tuer toutes vos plantes et
que vous paniquez à 11h du soir. Ou des pages et des pages sur cet oiseau qui descend du
tronc du pin la tête en bas (c'est le seul à faire ça!). Ou comment créer un jardin en pensant déjà aux
changements provoqués par le réchauffement climatique. Ou comment créer une
haie que vous n'aurez jamais jamais jamais à tailler.
Mais quoi que vous fassiez dans votre jardin,
pensez toujours au hérisson. Si vous avez un hérisson, alors votre responsabilité
consiste à le protéger. Le hérisson, c'est l'équivalent moderne de la petite
tortue des années 60 (quand c'était encore possible d'en acheter). C'est une
chance, un lucky charm.
Pour obtenir un jardin d'agrément bien entretenu, il y a la notion de travail quotidien nécessaire pour le réussir.
RépondreSupprimerPour obtenir un jardin POTAGER qui donne des légumes agréables à manger toute l'année, il y a aussi un EFFORT à faire pour ne pas laisser tomber les jours où... la lassitude nous gagne.
Les anciens avaient peut-être un peu plus de courage que notre génération, j'ai encore un brave beau-père de 78 ans qui tous les matins commence sa journée par un tour de son 100m2 productif.
Mais c'est un travail !
Solange D.
Dans mon nouveau quartier à Tôkyô, les gens n'ont pas de jardin, les quartiers ont été découpés à l'équerre il y a près de 400 ans.
RépondreSupprimerLes plantes envahissent les rues, les trottoirs, des fois, un arbre dépasse du mur, on se demande comment il cohabite avec la maison dont il mine la façade et les fondations, tout en admirant le propriétaire qui le taille en conséquence...
La verdure envahit tout, parfois, le trottoir est bordé des deux côtés par des dizaines de pots de toutes sortes avec de la végétation abondante, et on doit presque se faufiler pour passer. Les habitants passent du temps à tailler, replanter, effeuiller tout ça, et réparer après un typhon.
Je me demande comment j'ai pu vivre toutes ces années sans végétation. Je suis un urbain, mais cette végétation envahissante des quartiers de l'est de Tokyo m'est devenue nécessaire, vitale... Je vais m'y mettre. Pas un jardin, juste des trucs qui envahissent... J'adore ça, ici, tout pousse!
Bises.
Moi je ne connais pas ce genre de base. Merci pour cet article :)
RépondreSupprimerBel article. Quand je peux planter des pieds de myscanthus ? je peux y penser en septembre, octobre ? quelles variétés pour commencer ?
RépondreSupprimerEt c'est quoi ta théorie personnelle sur la familiarité du rouge-gorge !
Patience avec cette jambe ...
Jack