mercredi 29 juin 2011
la vida es espléndida
Le jardin est merveilleux en ce moment. Je le dis parce qu’il faut que ça sorte comme une urgence politique syrienne ou un autre sujet de controverse mondiale comme : est-ce qu’on peut avoir un follow-up journalistique de qualité sur ce qui se passe au Yémen SVP ou on va encore nous offrir la preuve que les médias sont trop paresseux à rester dans leurs hôtels pour occidentaux ?
Avec la pluie des derniers 15 jours, c’est toute la nature qui a été rassurée, dans le genre « OK, on est un mois en avance sur tout, cette année les poires vont arriver en juillet et les premiers miscanthus sont en train de sortir leurs plumets alors que jamais jamais jamais on les voit avant août au plus tôt », mais toutes les plantes étaient dans la dernière ligne droite du calvaire de la sécheresse. Les fruitiers en espalier ont tellement souffert que quelques branches entières ont séché d’un coup, c’est normal je ne leur donne pas assez d’eau alors qu’il faut y aller pour avoir de gros fruits, je le sais, et certains hortensias ont fait la gueule, comme les fougères après un joli départ, les chèvrefeuilles aussi et je ne parle pas de la pelouse qui a grillé mais ça je m’en fiche et les primevères d’été je ne compte pas dessus cette année – déjà si elles ne meurent pas je serai content, mais le reste du jardin a résisté vaillamment (comme on dit) à une période sans pluie très rare, surtout en Normandie.
Du coup, ce printemps a été exceptionnel pour toutes les roses, tellement heureuses de ne pas subir les averses qui abîment les pétales, les clématites aussi qui sont parfois fragiles et le crambe cordifolia qui a fleuri pour la première fois après deux années de patience, avec ce panaché inouï de fleurs minuscules de chou qui ressemblent à du gypsophile nucléaire. Dans un parterre de graminées qui poussent, on dirait une boule radioactive, un nuage qui se détache avec des petites étoiles partout. Avec la stipa gigantea, ce fut la plante phare du mois dernier même si autour il y avait toutes ces fleurs, les aliums en boule, les ancolies de toutes les formes qui s’hybrident pour créer des couleurs vraiment zarbi, même les coquelourdes se mélangent entre les blanches et les shocking purple, les campanules ont été suprêmes, mais les deux pieds de stipa gigantea, l’un à côté de l’autre, c’est un émerveillement total, une couronne de tiges de deux mètres de haut avec des graines d’avoine qui s’ouvrent comme un feu d’artifice qui revint chaque année toujours plus fort à partir d’une plante qui ne demande aucun entretien, strictement aucun. Il faut juste la place dans un endroit dégagé, en plein soleil, assez proche pour pouvoir la toucher, afin de faire un point focal et dès qu’elle sent qu’elle ne sera pas dérangée par ses voisines, alors elle prend le dessus et s’impose à tout le monde. Il faut lui donner de la place.
Ce massif central de graminées, planté il y a 3 ans quand j’ai eu ce petit problème cardiaque est désormais adulte. Oui, avant j’avais un champ de cosmos qui attirait beaucoup plus d’insectes et de bêtes de toutes sortes, ça buzzait non stop all day long et il y avait ces grosses sauterelles vertes que j’adore car elles sont le signe que tout va bien, mais c’était trop d’entretien et désormais toutes ces plantes ont pris leur place et s'élargissent, je n’ai même plus à désherber, les vivaces se mélangent et se chevauchent comme les eryngium planum qui font des rejets dans les rares endroits non envahis par les asters et les anémones d’automne. Il n’y a plus de place libre, le dégradé entre les différentes variétés de miscanthus, de panicums, de poa cita est juste parfait, on dirait que ça a été fait avec une app mais non, et j’ai même mis de temps en temps quelques glaïeuls cheapos au milieu de tout ça qui sont super choucards. Tout est sauvage avec des scabieuses qui fleurissent non stop et qui germent ensuite dans des endroits pas possibles comme entre les pierres de la terrasse, il faut pratiquement leur marcher dessus pour aller à la table pour manger et je commence à comprendre ce que je lisais sur les graminées, sur le fait qu’elles attiraient certains oiseaux pour les nids, je me disais « Nan c’est pas possible, il n’y a pas assez de volume pour faire un abri » et maintenant je vois bien que ce massif est impénétrable à part pour les chats des voisins qui, de toute manière, ne peuvent pas accéder à des grosses touffes de miscanthus d’un mètre de diamètre avec des tiges si serrées que cela forme une carapace.
Quand je passe devant ce massif, je peux bloquer sans réfléchir devant les fleurs du verbascum bombiciferum, j’en ai enfin planté deux même si la terre est trop bonne là où ils sont, il faut les mettre dans les endroits les plus ingrats car c’est vraiment une molène qui vit de rien mais il faut vous rappeler que j’ai l’air d’un méchant garçon comme ça à taper sans cesse comme un branque sur Delanoë mais ce jardin, vous n’imaginez pas à quel point c’est une source de bonheur. Je n’en reviens toujours pas de la possibilité de me fritter sur FB à cause de Caroline Fourest tout en pouvant, dans la minute d’après, sortir de la maison pour aller là où ça se passe et regarder ce qui a changé par rapport au jour précédent. Oh, ce Hystrix patula que j’ai acheté cette année a ses tiges qui sortent de la pénombre du petit bosquet, c’est vraiment une graminée qui peut rester droite à semi-shade et puis il y a la stipa capillata qui est en train de sortir des épis si fins qu’on croit que c’est vos lunettes qui sont rayées ou qu’il y a un cheveu sur vos verres, et puis il y a ces Melica qui sont parmi mes graminées préférées avec leurs chaton de poutou qui ressortent au soleil, il y a les verbascums sauvages qui lancent leurs grosses tiges vers le soleil, les sauges sclarea Turkestanica qui sentent le camphre et qui poussent partout, et ce pied de chicorée sauvage qui me donne chaque matin 60 petites fleurs bleues ciel pur que j’adorais tellement quand j’étais petit car il y en avait partout sur les bords de chemin dans les années 60 et ce Helianthus Lemon Queen de Thierry Denis qui est vraiment la plante que vous devez absolument acheter sans réfléchir car le moindre petit godet de rien du tout vous offre dès la première année un baobab de fleurs lemon incest et au bout de 2 ans à peine vous êtes OBLIGE de le diviser pour en mettre partout tellement ça pousse vite, il faut faire un effet de masse avec une plante aussi généreuse, là aussi sans entretien. Et il y a les knautias pourpres que j’ai semées au pire moment l’automne dernier quand Deom Christian m’a envoyé les graines et qui ont passé tout l’hiver si dur dans un pot avec une vitre de verre dessus, c’était voué à l’échec et je les ai réussies, et il y a mes calamagrostis adorés bien sûr, un vrai rideau de tiges bien droites qui sont l’architecture de ce massif avec ces immenses artichauts de 3 mètres de haut que m’a offert mon frère Philippe et qui sont si beaux que je n’ose pas les manger et les mûres à tiges blanches offertes par Jean-Luc qui sont en train de produire ce bois argenté qui sera le plus beau à regarder en hiver quand il n’y a rien à regarder et le vent passe dans tout ça et fait moutonner les herbes comme dans une séquence de Ridley Scott ou de Terence Malik, il ne me manque plus que la main de Russel Crowe pour caresser tout ça car il n’y a rien de plus beau qu’un homme au milieu de tant de délicatesse foliaire. C’est un attrape nigaud pour lover ce jardin et quand mon ami Fred Javelaud m’envoie un fichier avec toutes ces photos prises lors du dernier week-end, je suis là à sauter d’excitation comme quand je reçois le dernier paquet de Falcon.
C’est comme une création qui se voit clairement mais dont on ne connaît pas le cheminement intellectuel. Tout commence à partir des catalogues de plantes et une feuille blanche avec un plan et une visualisation de ce que ça va donner dans 2 ou 3 ans, et quand on arrive au bout de 3 ans de patience et d’entretien, on est vraiment étonné de réaliser que la préparation a donné des résultats bien au-delà de ce qu’on pouvait imaginer au départ. Vous avez bien calculé la hauteur des plantes choisies, leur emplacement, tout pour que le regard monte naturellement du premier plan avec les petites plantes, puis vers les plants de taille moyenne pour culminer vers les géants du milieu du massif et après ça redescend de l’autre côté avec le même système. Et les plantes le savent, elles se soutiennent les unes les autres, sentant qu’elles sont épaulées pour résister aux orages et aux coups de vent et qu’il faut tenir jusqu’à l’automne qui est le moment d’extase des graminées pour arriver en hiver où là, votre jardin est plus beau que tous les autres car c’est le moment où les graminées donnent leur plus produit bonus ++, quand le froid et le gel les mettent en valeur.
Bref, le jardin a été sauvé par la pluie et les orages, il était parti pour une très mauvaise année et la pluie est arrivée à la dernière limite de ses résistances et toutes les plantes et tous les semis prennent, c’est le moment de l’année où le châtaignier émet son odeur de sperme si étrange et quand les oiseaux arrêtent de chanter sauf ce crétin de pinson qui n’a pas encore pigé qu’on est un mois en avance sur tout et que c’est le mois du chill-out et du barbecue. Ecrire deux bouquins dans des conditions pareilles, moi je le souhaite à tout le monde sauf à Caroline Fourest bien sûr, je me demande quel est son jardin secret à elle.
J'aime bien D. Lestrade ET Caroline Fourest... Problémée, Georges?
RépondreSupprimerMais oui, le follow up de qualité au Yémen quoi, debout les mecs!
L’huile essentielle de sauge sclarée est un euphorisant et un régulant naturel puissant, elle lutte efficacement contre tous les effets secondaires de la fatigue et du stress (contractions musculaires, déprime, anxiété...). Elle contient aussi des phytoestrogènes qui pourraient te transformer en journaliste lesbienne Didier. Attention avec l'odeur de camphre...
RépondreSupprimerPL
http://leplus.nouvelobs.com/contribution/139810;caroline-fourest-mais-pourquoi-tant-de-haine.html
RépondreSupprimerPour moi c'est encore et c'est juste le début eheh
RépondreSupprimerAh ça donnerais envie d'être maya l'abeille.
RépondreSupprimerPas d'accord avec la première phrase, de nos jours on peut buller dans un hotel class à NY et se retrouver spécialiste de la Guinée. On a même vu certain journaliste plutôt catalogué à gauche donner une interview sur atlantico ump. C'est le grand revirement ?
RépondreSupprimerbah non c'est la merde mes tomates ne murissent pas sinon oui la chicorée en fleur est une bonne raison pour se lever tôt et pourquoi dit-on "gay comme un pinson" ?
RépondreSupprimerToRdRe
Plus de billets formidables de DL depuis juin.
RépondreSupprimerEvidemment, tu as écrit un livre cet été...
Alors on te pardonne ; )
Andrew