lundi 20 septembre 2010

Obama m'écrit


J’adore recevoir des mails de la Maison Blanche. Régulièrement, un docu apparaît alors que mon index appuie automatiquement sur la touche delete de mon ordi. Une invitation FB pour un club avec un flyer immonde. Encore une étude absolument pas nécessaire sur le sida. Une newsletter gay qui me parle de, wait for it, c’est très inattendu… Lady Gaga. Quelqu’un peut m’envoyer une information digne de ce nom, bordel de merde ? Je suis à mon centième mail éliminé depuis ce matin et soudain, Michelle Obama m’écrit.

Ce n’est pas une histoire de prestige. Je ne suis pas particulièrement impressionné à l’idée de recevoir un message « personnel » de la Première Dame des Etats-Unis ou même un coucou de David Axelrod. En fait, tout le clan de la Maison Blanche semble se donner le relais pour nous envoyer ses petites nouvelles. Lundi matin, l’empereur, sa femme et le p’tit prince… « Alors, Michelle, tu écris à Didier le lundi et David (Axelrod), on t’a prévu une lucarne d’envoi pour vendredi ». Non, tout le monde y passe, dans un système d’alternance équitable qui privilégie soit le président, soit un secrétaire d'état qui a quelque chose à dire soit quelqu’un de totalement inconnu.
Je me suis abonné à la Maison Blanche (ça fait une jolie phrase à écrire, je vous assure) il y a plus d’un an, je ne me rappelle plus comment. J’avais sûrement appuyé sur la touche « Submit » du formulaire « Get Email Updates » en haut à droite de la home page de la Maison Blanche, par défi, du genre « on va voir si vous êtes capables de m’étonner ». Et à chaque fois que je reçois un de ces mails, un petit sourire apparaît sur mes lèvres, même quand je suis de mauvaise humeur.
Je vais vous dire : recevoir ces mails, c’est l’équivalent d’un bonbon à la menthe très frais au milieu de mails qui ont tous l’air d’avoir été lourdement amidonnés avant leur envoi. Car, merde, quelle maquette. C’est un vent de fraîcheur qui vous entoure, une brise transparente et caressante, et ce n’est pas pourtant quelque chose que l’on imagine facilement venir de la Maison Blanche. Quelqu’un, quelque part dans la West Wing, ou alors dans un sous-sol de bureau outsourcé ailleurs, a appuyé sur une touche qui a envoyé des millions de mails à travers le monde et le mien est parvenu dans mon petit village de Normandie. Cool, non ?

Et surtout, c’est là le point central, quel joli mail. Le logo de la Maison Blanche est calé au centre supérieur du docu, entouré d’un halo grisé d’une luminosité incroyable. Ce n’est pas du blanc, ce n’est pas du gris, c’est un gris-blanc-poudré qui semble accrocher la lumière de votre ordinateur. Cela rappelle l’émerveillement qui a accompagné les premiers jours de Photoshop. On imagine même des sous-couches de couleurs encodées dans le blanc, indiscernables par le commun des mortels, pour le rendre inconsciemment plus beau, plus riche, plus institutionnel, plus américain quoi ! C’est l’équivalent du parchemin moyenâgeux avec le ruban scellé par la bougie. A message from the White House to youuuuu ! C’est ce blanc qui signe l’envoi de la Maison Blanche et on imagine une équipe de 25 geeks en train de faire des sessions de brainstorming pour lui donner encore plus de relief, dans un style très WASP, très Calvin Klein. D’ailleurs, pour ajouter du prestige, quand vous recevez un mail d’Obama-himself, le logo de la Maison blanche a carrément disparu pour un autre en-gris-sur-blanc-sur-beige. Du genre less is more, là on ne rigole plus.
Et le texte ! En bas, le titre du mail est inscrit en doré, oui en or ! On dépense sans compter ! Et dans le texte, chaque mot paraît plus clair, plus dynamique. C’est la Maison Blanche qui vous écrit, bordel. Et vous lisez le mail, même si le sujet ne vous intéresse pas, parce que vous vous dites qu’ils ont pris la peine de faire ça bien, eux. C’est pas comme si vous receviez un message de la Mairie de Paris pondu par un stagiaire du PS qui est arrivé là juste parce qu’il espère coucher avec quelqu’un pour avoir de l’avancement et qui vit dans un studio avec une mezzanine en bois clair (du pin, tiens) achetée dans une rue secondaire du sixième arrondissement.
Ah, vous me voyez venir. La Mairie de Paris. Ben non, pour une fois, je parlerai plutôt de la Présidence de la République française. Vous avez remarqué le joli pupitre qu’ils ont choisi pour les conférences de presse de l’Élysée ? Avec un joli logo bleu en relief qui donne un côté Washington au 55, du Faubourg Saint-Honoré ? C’est bien, on s’en approche de la signalisation présidentielle. Mais le reste ! C’est comme si les gens qui « travaillent » à l’habillage de l’Élysée s’étaient dit, d’un commun accord : « OK, on a réussi le pupitre de la salle des médias, on fera le reste et toute la déclinaison de la charte graphique quand la maquette du Canard Enchaîné sortira du 19ème siècle. Traduction : NEVER !

Il y a vraiment un truc qui me tarabiscote dans le design Web o.2 machin. Comme Facebook est le "troisième Etat" de la planète, on est submergé d’invitations à des fêtes ou à des événements avec des images hideuses. C’est le revival des flyers pédés des années 90. Et que je te mets des mecs dénudés qui n’ont même pas le look de Now et qui semblent sortis d’une banque d’images qui vient de Budapest. Et que je t’envoie des invitations d’expo qui ressemblent à des cartons pour des débats de quartiers organisés par la mairie du onzième arrondissement (je crois que c’est PS là-bas, ahah) ou alors une icone de pouffiasse par une pouffiasse qui t’invite à jouer à Farmville. Connasse, je vis à la campagne, j’ai pas besoin de ton succédané de récolte champêtre.

Moi je dis. Regardez un peu les mails de Michelle Obama. J’ai beau être furax à mort contre son mari et Hilary Clinton qui se foutent de notre gueule sur le sujet de Gaza et tout ce qui se trouve autour dans un rayon de 1000 kilomètres (au moins), mais ça fait du bien de respirer et de mettre de côté sa colère pour écouter à ce qu’elle a à dire. Tiens, aujourd’hui, c’est la maltraitance des bébés girafes. Intéressant.

4 commentaires:

  1. Je vous écris d’un pays lointain. Je vous écris du bout du monde. Il faut que vous le sachiez. Souvent les arbres tremblent. On recueille les feuilles. Elles ont un nombre fou de nervures. Mais à quoi bon ? Plus rien entre elles et I'arbre, et nous nous dispersons gênées. Est-ce que la vie sur terre ne pourrait pas se poursuivre sans vent ? Ou faut-il que tout tremble, toujours, toujours ? Henri Michaux 1938

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  2. Ce qui frappe aussi sur le site de la maison blanche c'est la qualité des photos: classiques mais très travaillées.
    Même la moindre rencontre avec la présidente d'une association de consommateurs est photographiée comme si c'était les accords de camp david.
    En France, on préfère du pourri gratuit vu que c'est l'agence de com du copain qu'a déjà bouffée le budget.

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  3. C'est en fait ce qui caracterise le plus les US, ills "font ca bien", com me on dit. Ca vat pour les series TV, le cinema grand public, la pop et les chains d'informations (a l'exception d.Euronews")...

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