mardi 25 octobre 2011
Un monde d'hommes
Il y a des hommes que je n'ai pas aimés dans ma vie et je commence à accepter le fait que je ne les rencontrerai jamais. Sur Tumblr, on est régulièrement confronté à des idées comme "You only live once" ou "Bad decisions make beautiful stories" et à chaque fois, une partie de moi frémit car je sais que c'est un idiome dangereux qui encourage le risque le plus idiot. Et surtout, cela sous-entend que le moindre écart à cette obligation d'aller au bout de la pire connerie est une déception existentielle, ce qui est parfois vrai, mais il faut rappeler que la vie nous empêche parfois de réaliser tous ces rêves parce qu'il existe d'autres obligations qui sont au-dessus de ces rêves et l'expérience de la vie nous oblige, précisément, à ne pas se laisser dépasser par la frustration de ces rêves parfois impossibles à réaliser.
Depuis plusieurs années, je n'arrête pas de me dire que si j'étais tombé amoureux d'un Espagnol, ma vie aurait bifurqué d'une manière très importante en me dirigeant vers le sud au lieu d'aller vers l'ouest. J'aurais dépassé mes complexes face à la langue espagnole que j'admire tant et j'aurais découvert toutes ces étendues de terre à l'intérieur du pays, celles qu'on voit dans certains films d'Almodovar, une des régions les plus romantiques pour moi.
De même, je n'ai jamais rencontré d'Italien et je considère que cette lacune est un des échecs de ma vie car la langue est aussi si belle et c'est d'ailleurs pourquoi je n'ai jamais mis le pied à Rome. Pour moi, c'était la seule ville à visiter avec un Italien amoureux, il n'était pas question que je découvre cette ville comme les autres, avec un plan et au hasard. C'était amoureux ou rien du tout. Et puis, il y a tout le reste de l'Italie, car ce que j'en ai vu était déjà si énorme que je ne me sentais pas assez fort pour affronter ça tout seul, je suis un vrai gay classique dans ce sens, ces paysages italiens et grecs, pour ma génération, c'est le summum de tout, ça va au plus profond de nos tripes.
J'ai rencontré un Allemand et il m'a beaucoup influencé. J'ai eu la chance de tomber amoureux d'un jeune Canadien moustachu blond qui m'a laissé admirer son accent et ses expressions concrètes. J'ai eu beaucoup d'Anglais et même des skinheads avec l'accent écossais mais jamais eu de mec avec l'accent cockney ou de Liverpool ou de Manchester et je n'ai malheureusement pas eu le plaisir de vivre, même une courte période, avec un Irlandais à l'accent prononcé. J'ai eu un Chilien qui m'a appris des choses et qui baisait avec une régularité réconfortante, un peu comme ce bourge Versaillais souriant, poilu blond de partout, toujours à l'aise, toujours expansif, toujours en sueur. J'ai eu de belles histoires avec des Antillais qui sont parvenus à me faire très vite comprendre que j'avais un don inné pour leur plaire et m'accommoder de leur étrange caractère.
Mais je n'ai jamais rencontré de mecs avec des dreadlocks ce qui est une tristesse dont je ne me remets toujours pas, je n'ai pas eu d'histoire d'amour avec un arabe ce qui explique beaucoup de complexes, et je ne parle même pas ici du continent africain car vous ne voulez pas que j'aborde ici ce sujet tellement il est vaste. J'ai eu un Grec aux jambes blondes poilues (il y a un terme pour ça dans la langue grecque je crois mais je l'ai oublié), mais cela n'a duré que le temps d'un blow-job, je n'ai jamais rencontré de Turc poilu de partout et surtout des jambes, je n'ai pas eu un seul homme d'Europe Centrale et plus loin, de Géorgie, un pays qui symbolise pour moi un des centres telluriques du monde. J'ai eu un Israélien tellement gentil et qui sentait si bon que cela m'a ouvert l'esprit sur beaucoup de choses, je n'ai jamais rencontré de Russe mais cela ne me gêne pas car c'est une partie du monde qui ne m'intéresse pas, mais j'ai eu un Polonais généreux, blond et poilu, qui baisait si bien qu'il en a fait son métier.
Un des grands trous noirs, c'est de ne pas avoir eu d'histoire avec un Japonais, du genre de celui qui joue dans "L'empire des sens", mais je me dis de plus en plus que ces Japonais-là sont totalement inabordables pour des raisons extrêmement nombreuses et peut-être même n'existent-ils plus. Je n'ai pas rencontré d'Indien ou de Pakistanais et ça commence à me pomper grave car je les trouve incroyablement masculins et poilus et je suis assez en colère quand j'en vois de très jolis à Paris, surtout parmi les jeunes de la troisième génération. Les Chinois et les Coréens m'impressionnent de plus en plus, comme tout le monde de suppose, car le XXème siècle a fait semblant de ne pas les voir.
L'Amérique du Sud, c'est comme l'Espagne et le Portugal, des hommes d'une beauté hallucinante et là aussi, je fais partie de ces rares gays qui n'ont pas dépensé toutes leurs économies pour les rencontrer car je ne trouvais pas casher de faire du tourisme sexuel. Résultat : pas d'Argentins, pas un seul Brésilien, ce qui me met de facto dans une case où je dois être la dernière folle au monde à ne pas avoir été en contact direct avec leur beauté, probablement la plus aboutie sur la planète Terre. Il y a ici un sujet qui mériterait un livre tant la frustration est immense, pas uniquement dans le strict cadre sexuel, mais tout ce qui se cache derrière, les villes, les plages, la nourriture, les immenses étendues de pampas avec des graminées qu'on ne trouve que là-bas et qu'on est juste au stade de découvrir. Bien sûr, la langue, la musique, l'architecture, tout.
En remontant vers le nord, ce sont toutes les grandes îles qui me sont passé au-dessus de la tête, Cuba et Haïti, alors que je connais tant de gens qui sont tombés amoureux de ces pays, et le Venezuela et ses 2000 kilomètres de plages pratiquement intouchées et le piiiiiiiiiire pour moi, c'est le sud des Etats-Unis, la Nouvelle Orléans, la Géorgie, la Caroline du Sud, l'Alabama, la Louisiane, tout ça, le plus bel accent au monde pour moi, une sorte de piège fatal du sex appeal, quelque chose qui fait que vous êtes en demande de chaque mot, de chaque expression qui sort de la bouche d'un homme, ce qui est une situation très rare si vous y pensez une seconde. C'est comme un plus produit qui devient en fait presque plus important que la beauté et la sensibilité de l'homme, un puits sans fond, quelque chose qui se renouvelle chaque jour miraculeusement dès le réveil, même quand celui-ci s'avère difficile. C'est une introduction à tout ce méli-mélo complexe du sud, l'esclavage et la catastrophe, le choc de deux races qui se mélangent, l'origine de tout.
J'ai eu ma part d'Américains mais je n'en ai jamais eu assez, bizarrement, au stade où je pense désormais en langue anglaise, dans mon esprit les premiers mots qui me viennent sont souvent dans cette langue et il faut parfois que je me pose la question : "Mais comment on dit ça en français déjà?". Je n'ai jamais rencontré de Latino et ce qui me rend triste aujourd'hui, c'est surtout de ne pas avoir rencontré de métis Américain - Japonais ou Américain - Chinois car you don't wanna me to dwell on this.
Tout ce qui est protégé par le Pacifique est dans mon cœur le summum du summum. Tous ces peuples qui ont inventé le surf et le tatouage, les Maoris et les autres et plus on s'approche de la Nouvelle Calédonie, de la Nouvelle-Zélande et de l'Australie, je ne pourrais même pas le décrire dans un texte si court. Tout le monde sait dans ma famille que mon père a failli s'installer en Nouvelle-Zélande avant de partir de l'Algérie et nous avons passé notre jeunesse à lui reprocher de ne pas l'avoir fait. Là aussi, mon amour pour ces hommes et toutes les ethnies qui peuplent ces îles est accentuée par une erreur du destin, quelque chose qui était si proche. La vie de ma famille aurait été toute autre et je rage de ne pas avoir grandi dans ces vallées remplies de moutons et des plus belles graminées au monde, et de voir ça à partir du début, dans les années 60 quand c'était vraiment vraiment un monde pauvre. Nous aurions grandi avec les chevaux et les moutons et les hommes qui les élèvent, avec la mer si froide mais si riche, la proximité avec l'Australie et le Japon et l'Indonésie. Quelle erreur de destinée, tout cela pour arriver dans le Lot-et-Garonne.
On aurait vécu avec la terre rouge, nos mains seraient épaisses et brulées par le soleil, nos corps se seraient développés malgré les complexes de l'homosexualité d'alors, nous saurions survivre pendant plusieurs jours dans la dureté de la nature, bref je serais un homme Brokeback Mountain au lieu d'être un activiste sida. Je serais reconnaissant à mon père de nous avoir extirpé du drame algérien que nous payons encore jour après jour, année après année, décennie après décennie et j'aurais forcément développé une fascination sans borne pour la culture française, ce qui est loin d'être le cas aujourd'hui. Je ne suis jamais allé dans ces pays, redoutant toutes les choses qui m'émerverveillent, les paysages et les hommes, pour ne pas voir ce à quoi j'ai échappé. Inconsciemment, j'ai utilisé toutes les excuses financières, ou la longueur des voyages, ou la peur de tout laisser tomber pour recommencer à zéro à partir du choix malheureux de mon père, ce choix qu'il a pris pour respecter sa famille et ses propres fils, ce choix qui l'aurait pourtant rendu plus libre. Ces choix qu'on ne peut pas toujours faire, contrairement aux slogans que l'on nous impose aujourd'hui comme "Vivez votre vie comme si c'était le dernier jour" ou "You only live once", des slogans que l'on impose aux jeunes pour des raisons strictement commerciales et qui nourrissent finalement la vente de jeans et d'Energy drinks. Cette Nouvelle-Zélande, qui vient de gagner la Coupe de Rugby, qui aurait pu être mon pays, je n'ose même pas la découvrir car je crois que je me mettrais à trembler dès l'apparition du premier homme barbu blond ou des graminées à flancs de colline, brutalisées par le vent et le froid, et par tous ces hommes d'Australie, surtout ceux qui sont arrivés de Grèce il y a quelques décennies et ces accents différents qui sortent de leurs bouches. C'est juste too much et s'il n'y avait pas eu le sida et l'obligation de me soigner dès 1986, je serais parti, je le jure, je serais parti loin pour renouer avec le rêve de mon père qui ne s'est jamais réalisé.
dimanche 23 octobre 2011
Les noix
Il y a une impression désagréable dans la récolte des noix. Je crois que c'est un trait commun à toute l'agriculture, le moment de la récolte, c'est le plus énervant de l'année. Même si la récolte est bonne, comme cette année, et que les noix n'ont jamais été si grosses et si belles grâce à la pluie cet été, la vie quotidienne change car il faut les ramasser le matin et soir, c'est impératif.
Mon père avait déjà ça pendant la récolte des prunes, dans le Lot-et-Garonne. Il ne fallait pas l'embêter à ce moment-là. Comme la ferme était au centre de 4 fours à pruneaux, le travail se faisait jour et nuit car les fours ne doivent pas s'arrêter et il faut surveiller la cuisson et débarrasser les cagettes cuites pour y mettre les prunes à cuire. Chaque fin d'été, le bruit des fours était incessant, un vrombissement qui s'associait au parfum renversant, celle de la prune qui cuit, comme si une immense tarte aux prunes embaumait l'air, un parfum si chaleureux qu'on se demande pourquoi un parfumeur ne l'a pas encore commercialisé.
Ah bon, ça existe? Donc les noix sont à la merci de mes écureuils qui n'arrêtent pas de les piquer et de les enfouir dans les massifs, ce qui me donne une pépinière de jeunes noyers dans mon jardin, de très bons cultivars car ils viennent d'un arbre très solide et reproducteur. Le matin quand je me réveille, je le vois déjà en train de faire des allers et retours pour me piquer les noix sur le sol et il commence dès le lever du jour le petit salopiot et si je ne vais pas ramasser ce qu'il n'a pas déjà volé, il a gagné quoi.
J'ai beau offrir ces noix aux amis pendant tout l'hiver, ce noyer donne tellement que je ne sais pas quoi en faire. En plus, on ne ramasse pas les noix comme ça. D'habitude, ma pelouse est grillée en fin d'été et les noix se voient bien au milieu des premières feuilles mortes. Là il faut les chercher dans la pelouse toute verte qui pousse encore et enlever cette petite barbe noire qui entoure la coque parce que ce n'est pas joli autrement. Je ne garde que les grosses noix, les autres je les jette à la base de l'arbre, ça fait un petit cadeau à l'écureuil et peut-être même un decoy pour qu'il ne prenne pas les plus belles.
Il faut avoir un panier en grillage pour permettre aux noix humides de mieux sécher, moi je les laisse au soleil pendant la journée, recouvertes d'un tissu autrement l'écureuil vient se servir dedans directement le petit salopiot. Quand on a fini un coin sous l'arbre, on tourne tout autour du tronc dans un mouvement concentrique. Souvent, les plus belles noix ne sont pas sous l'arbre, elles sont à son extrémité extérieure, elles viennent des nouvelles branches plus exposées au soleil, ou elles ont roulé en tombant. Quand on a fini de faire le tour dans un sens, on recommence la même chose dans l'autre sens car il y a toujours des noix qui se sont cachées derrière une touffe d'herbe. Enfin, quand j'ai fait deux tours, je regarde toujours sous l'arbre avec le soleil derrière moi. La couleur des noix qui restent sur le sol ressort alors avec leur belle tonalité qui brille sous la lumière. Il faut aussi utiliser son pied pour sentir les noix sous les feuilles mortes, donc ça fait bouger toute une section du bassin pour gagner la taille fine. Après ça, je peux considérer que la récolte est finie. Avant le soir.
Ca tombe bien parce que ça fait un peu mal au dos. J'ai des amis qui n'aiment pas ramasser les noix et c'est vrai, il y a un côté tatillon et obséquieux dans cette récolte qui ne ressemble pas à celle des pommes ou des poires, même les petits fruits rouges. C'est un peu comme les prunes en fait. On s'en met plein les mains, les doigts deviennent noirs (juste un peu, arrêtez de crier), un ami m'a dit que ça ressemblait aux marques des poppers et c'est vrai, j'avais oublié ça. Mais l'odeur est magnifique, même si certains ne l'aiment pas. Après tout, le noyer est rempli de l'odeur du tanin, une substance que l'on conseille de ne pas ajouter aux massifs de fleurs ou dans le potager car c'est toxique. Pourtant, une des beautés de l'automne, c'est aussi d'écraser dans ses mains quelques feuilles de noyer et de renifler l'odeur poivrée dans le creux de la paume.
Le noyer ne demande aucun entretien, aucun traitement, mais il faut penser à couper les branches qui poussent à l'intérieur de l'arbre car elles ne servent à rien et réduisent la circulation de l'air. C'est un arbre qui n'aime pas la taille donc il faut le faire maintenant (je crois), mais je n'en suis pas sûr, quand la sève se retire des branches pour l'hiver.
C'est un arbre merveilleux pour la sieste et oui, c'est vrai, il est frais en été quand il fait chaud et non, je ne crois pas qu'on attrape un rhume parce qu'on a dormi dessous. En général, surtout en Normandie, le noyer a la délicatesse de coordonner sa récolte avec les derniers beaux jours de soleil comme en ce moment mais parfois, certaines années, elle tombe en pleine saison des pluies et ce n'est pas drôle du tout. Il faut ramasser les noix avec les gants, tout est gluant à cause des coques externes qui pourrissent et il y a toujours la goutte d'eau qui tombe de l'arbre dans votre cou, grrrrrr. Tout est humide, les noix doivent être mises dans un seau d'eau pour les nettoyer un peu, et ensuite mises devant la cheminée pour les sécher et qu'elles retrouvent leur belle couleur blonde. Tout ce qui n'est pas ramassé sera mangé, soit par les écureuils, soit par les corbeaux. Mais c'est le meilleur moment pour regarder ces animaux et l'écureuil est tellement excité qu'il s'approche de la maison car il cache les noix dans tous les massifs, même les plus proches. Il est capable de venir mettre une noix derrière une pierre juste à côté de la porte d'entrée. S'il pouvait, il irait en mettre dans le réfrigérateur de la cuisine.
Ils sont si mignons. Ils jouent à plusieurs dans le grand pin, ils font leur nid dans les charmes près de la maison, ça ressemble à une petite boule de nid de pie à base de brindilles et de feuilles, très haut dans l'arbre, ce qui fait que les jours de tempête ça doit être assez shaky. Avoir un noyer et un châtaignier côte à côte, comme chez moi, c'est l'assurance d'avoir des écureuils pendant des années et des années, bien qu'ils soient très fragiles et perdent beaucoup de petits.
Le noyer à aussi cette couleur d'écorce unique avec un lichen qui forme des taches grises presque argentées et d'autres jaunes vif, un excellent motif de papier mural si je peux me permettre. C'est un peu comme les gens de la mode qui n'ont pas encore compris que le plus joli motif de kaki camouflage, c'est celui du platane. Sortez dans la rue, regardez un platane et imaginez une veste Stüssy ou Supreme avec ce motif. Ah bon, ça existe? Moi je dis ça je dis rien, j'ai pondu le concept de la dernière expo d'Olympia Le-Tan lui disant il y a 5 mois qu'elle devrait faire des sacs à mains à partir des gros livres sur le sida ou les encyclopédies médicales qui sont toujours super bien reliées avec du brochage de la mort, des titres gauffrés en doré, des trucs comme ça sur gros tissu. Bing, elle fait une expo super jolie avec des drôles de canapés en forme de seringues et de logos de la Croix Rouge. Conceptuel or what.
Bref, l'écorce de noyer est magnifique et on aimerait bien porter ça sur soi, une veste avec ce motif-là, c'est reblogué 10.000 fois sur Tumblr, sans problème. Enfin, ce qu'il faut dire sur les noix, c'est que leur récolte n'est pas facile mais c'est celle qui ressemble le plus à la récolte des œufs de Pâques. Bon moi je n'ai jamais été dedans et quand on était petits, il y avait tellement peu de bonbons à récolter dans le jardin, et en plus avec 3 grands frères qui allaient plus vite que moi, c'était un non évènement, mais je suis sûr que parmi les lecteurs de ce blog certains y trouveront une sorte d'excitation fétichiste que je n'encourage pas mais qu'il était bon de signaler à toutes fins utiles.
vendredi 7 octobre 2011
Le jardin, là maintenant
Oui, j'ai rien écrit de fondamentalement nouveau sur ce blog depuis deux mois à part ma déclaration pour Hubert Duprat et c'est pas comme si j'avais rien foutu, je suis resté blocada devant mon ordi tout l'été pour écrire deux bouquins et je reprends ce blog là où je l'ai quitté (conceptuel) : le jardin. Il est, comment dire, stupendous. Il a tellement plu en juillet et aout que je n'ai même pas eu à perdre du temps à arroser et en fait, je n'ai presque pas regarder le jardin pousser. Certains jours, je n'avais même pas le temps ou l'envie d'aller chercher le courrier.
En fait, tout ça était prévisible. Printemps très sec, été pluvieux, les agriculteurs du coin l'on vu venir et c'est pour ça qu'ils ont semé, en pleine canicule de fin du printemps, des champs de maïs qui demandent beaucoup d'eau. Ils ont fait le pari de semer une plante qui aurait été incapable de pousser si le manque d'eau persévérait et ils se sont dit que la pluie arriverait au milieu de l'été, quand le maïs pousse très vite avec la chaleur. Avec la pénurie de céréales à travers le monde, ils sont sûrs de faire des bénéfices record. Ils vont se faire plein de fric, comme en 2007. Donc la prochaine fois que vous les entendrez se plaindre à la télé, vous pourrez leur dire pouet pouet.
Le jardin est si beau chaque jour davantage que je n'ose pas m'en approcher. Je le jure. De mes fenêtres, je vois les miscanthus qui fleurissent à une hauteur que je n'ai jamais vue. Certains font bien 3m50 de hauteur. Au bout de trois ans, ce massif a bénéficié lui aussi de toute l'eau de l'été, des orages en pagaille, et tout se mélange, sans la moindre mauvaise herbe. C'est hallucinant de perfection et je rappelle que je ne m'en suis pas occupé de tout l'été. Donc le massif se tient désormais tout seul, c'est pratiquement impossible d'y pénétrer et chaque jour, chaque variété différente de graminée est en train de lancer ses têtes vers le ciel, on les voit pratiquement pousser. Contrairement à l'année dernière, où il avait fait sec et la majorité des miscanthus n'avaient pas fleuri, cette année tout le monde y va de son plumet, avec chacun une texture, une couleur et un duvet différent. Même le pied de Sorghastrum nutans "Indian Steel" qui avait végété pendant ses deux premières années de plantation est heureux avec ses tiges qui se dégagent bien au-dessus du feuillage. Pareil pour les miscanthus Purpurascens qui faisaient la gueule, leurs tiges se préparent et j'attends de voir ce que ça donne car cette variété est connue pour faire des tiges bien droites avec des plumets verticaux, ce sont eux que l'on voit souvent dans les films chinois ou japonais quand vous voyez des étendues d'herbes argentées qui ondulent sous la tempête.
Tout est vert, tout pousse, pour culminer fin septembre et octobre, le moment où tous les miscanthus sont parvenus en floraison. Je sais, tout ceci ne produit pas beaucoup de pollen contrairement au champ de cosmos que je plantais il y a 8 ans.
Mais il y a une foule d'insectes dans ces herbes et des bourdons sur les eryngeiums et bien sûr des campagnols. Hier soir j'ai vu sur le bord du massif, sur la pelouse, une longue crotte de la fouine qui vit sous le toit de ma maison : plein de poils de souris et un bout de coquille d'œuf d'oiseau. Funky. Il y a aussi les araignées magnifiques, les argiopes, qui se sont installées, que j'ai reconnues ensuite dans le "Guide de la nature, milieu par milieu". Une belle bête qu'on voit toujours la tête en bas dans sa toile, avec son ventre strié de noir et de blanc qui copie les couleurs de la guêpe pour faire peur à ses ennemis.
Les artichauts ont des têtes droites de 4 mètres de haut, je ne mens pas. Encore cette année, j'ai refusé de les manger car les fleurs étaient trop belles. Je les laisse sécher sur place pour l'hiver. J'avais beaucoup plus de chardonnerets à l'époque des cosmos, mais il reste quelques couples qui restent dans le jardin tout l'hiver et qui se nourrissent des graines qui s'ouvrent avec le froid.
Les grandes révélations de cette année, ce sont deux plantes achetées pour les tester. La première est Stipa capillata, qui a fait dès cet été une demie douzaine d'épis de 50cm de hauteur, un artifice de graines si fines qu'il faut vraiment s'approcher pour les discerner. Elles sont très douces quand on les prend dans la main pour les faire glisser à l'intérieur de la paume. Dès le première année. Je me demande comment ce pied sera dans deux ou trois ans, ce sera sidérant. C'est une plante à installer en groupe, c'est trop joli. Ou en pot.
La seconde, Elymus Hystrix, était vendue comme une graminée qui accepte la mi-ombre, ce qui est assez rare pour celles qui font plus de 80cm de haut. Et c'est vrai, je l'ai mise dans un pot pour la tester à l'endroit d'un nouveau massif que je terminerai cet hiver, sous un châtaignier, et elle est si impressionnante que tous mes amis à qui je la présente sont bouche bée (comme on dit). C'est une graminée qui dès la première année produit une jolie touffe de feuilles basales fines d'où surgissent de grandes tiges bien droites avec un goupillon au bout qui ressemble à un porc-épic (d'où son nom). On dirait un immeuble de Dubaï, un délire architectural : à la mi-ombre, dans le sous-bois, on voit ces étincelles qui captent le moindre rayon de soleil, surtout si le fond des arbres est sombre. Elle est généreuse, elle tient bien droit, une vraie tour, et si l'on cueille les tiges pour en faire un bouquet, elle produit une seconde vague au mois d'août. Je vais faire un massif avec 10 pieds de cette merveille!
Les anémones Honorine Jobert sont bonkers, les roses et les blanches, je sais c'est un cliché cette vivace, mais c'est la première année où elles sont si belles et elles envahissent le moindre espace entre les graminées. Les plus beaux sont les panicauts "Heavy Metal" avec des feuilles glauques grises en épis pointus qui se dressent très haut, et encore, je n'ai pas réussi à trouver les plus beaux de tous, le "Northwind" qui est supposé être une sorte de fusée verticale qui résiste à tout, même en hiver.
Le flop du jardin de cet été, c'est tout le côté nord de la maison qui ne s'est pas remis de la sécheresse du printemps, malgré la pluie arrivée en été. Tout a été raté dans ce coin, même les fougères qui ont été mangées par je ne sais pas quoi, je n'ai jamais vu des fougères se faire dévorer de la sorte. Les primevères sont presque toutes mortes, sympa pour ma fleur préférée, et même les primevères à étages sont si malheureuses qu'elles n'ont pas produit d'épis. C'est tellement dégoûtant que je détourne le regard. Les osmondes royales ont grillé, ça me rend vénère, le rosier Mermaid a trop souffert de la taille radicale que je lui ai imposée car il devenait ingérable à monter sur le toit de la maison. Je crois qu'il va mourir et tant pis, ça lui apprendra, c'est un rosier trop piquant. Vraiment, c'est un rosier magnifique, mais mettez-le dans un endroit abrité où vous n'aurez jamais à le tailler, c'est un baobab ce truc. De toute manière, je sais déjà ce que je vais mettre à la place.
Et puis les premières poires n'ont pas été bonnes, peu de goût, de toute manière elles sont arrivées en plein rush de deadline de rendu de livre et je les ai vues tomber au sol et se faire manger par les merles. C'est affreux d'avoir des fruits du jardin et de ne pas les manger, mais c'est comme ça, arrêtez de crier, j'étais tout seul et je n'allais pas avaler 2 kilos de poires par jour, je n'ai pas besoin de faire de régime moi, je ne suis pas du tout attiré par les mecs bedonnants, je suis naturellement svelte grâce au VIH. Fat Fat Fat is not my game.
Depuis, les autres variétés de poires sont délicieuses et là ce sont les noix, j'en ramasse matin, et soir et les châtaignes n'en parlons pas, j'en ai VRAIMENT trop. Bon, j'arrête, j'ai des amateurs de jardins qui viennent demain et il faut que je tonde la pelouse before the Germans get there.
mardi 4 octobre 2011
Google is Outing's best friend
Pour la première fois de ma vie, j'ai envoyé un texte à l'International Herald Tribune pour leurs pages Op-Ed. Il n'aura fallu que 24h pour recevoir un mail de rejet. Et ça, ça veut dire beaucoup de choses de la part d'un quotidien que j'adore.
Last february, Le Monde published an interesting article regarding the french obsession about knowing which personality is Jewish. Okay... Apparently, the French google the names of famous politicians and personalities to check what appears first in terms of identity on search engines. Another article from Le Nouvel Observateur also went on wondering who is Jew with similar questions about identities.
In the past two weeks, a debate is happening in Italy as a big bunch of politicians are being outed as homosexuals. The French gay media has been responding with horror, like if it was discovering the issue. And everytime a sex scandals happens in France (which seems to be quite often these days since the DSK Affair), people want to found out the truth about what is not really said in the media. Because private life is so particularly well protected in this country, "Off the record" has become a parallel outlet. And wondering who is gay is a common interest because so few people actually come out. As a result, gay activism is at a standstill in France and coming-out has been erased from the LBTG agenda. Same sex mariage is still not a law, compared with surrounding countries. Not a single deputy at the National Assembly or the Senate with a proper coming-out. It should not come as a surprise that people use their fingers and keyboards to seek who are the most coward people in our gay elite. If they have a pathological fear of their identities, we do not.
Thankfully, there is Google. Google reveals everything you want to know. Each time someone asks Google the Oracle if a very famous actor or politician is gay, the search engine saves the request and the more people ask the same question, the higher the request ranks. It certainly does not answer the question like a statement would but it does shows that you're not the only one asking it. It makes Google coming-out's favorite aggregator. Enter someone's name in the search engine and witness what the power of statistics can do with a simple rumor.
It's fascinating no gay activist group has already used this powerful tool. The vast majority of the French gay and lesbian elite is not out. Worse, they do absolutely nothing for the cause, they stay silent. Some of them actually use the secrecy surrounding their sexuality to impose more taboo on the topic in their political party. They work in education but do not feel concerned by homophobia in school, high school or University. They are CEO's of big companies but endorse bullying and discrimination. They are journalists but subtly avoid any news concerning LGBT matters.
According to Valérie Touranian from ELLE, the DSK case was the catalyst for a change. She said there will be a before and an after DSK but we're still waiting for the "after" part. In France, most leaders insist private life must be preserved. No wonder gay marriage is blocked when LGBT leaders themselves support such a narrow-minded political vision.
So we thank Google for being coming-out's best friend.
Enter the name of the female or male politicians you suspect the most following your gaydar and check the results. The word gay comes first ? Bingo ! But there's more. Sometimes the name of the partner comes right under the word gay. But even don't stop there. On the first page or the second, you'll find a naïve person talking about his encounter on his blog "Wow, I did not know XX was gay ! I met him at a gay club in South of France and he told me he was gay himself !". Or better yet, you'll get the testimony of the hustler he spent time with in 2009 or 2010.
So thank you, Google. Albert R. Hunt said in an editorial in the New York Times: "What electors never forgive is hypocrisy". With a few goodwill, this could be a new golden age for LGBT activism. Everything's there... just reach out for it.
Didier Lestrade is a journalist, author, co-founder of Act Up-Paris and Têtu. He is out as a gay man and as HIV positive.
samedi 1 octobre 2011
Hubert Duprat
De tous les artistes que je connais, à part mon frère Lala, Hubert Duprat est le seul avec qui j'ai grandi. Nous étions tous les deux dans le même lycée d'Agen, c'était mon seul vrai ami, celui qui a averti le Principal le soir de ma tentative de suicide, à 17 ans, quand je m'étais réfugié sur le toit d'un parking à étage du centre ville, avec pour seuls objets le premier livre édité en France sur les graffitis de New York, et le premier livre sur la Factory d'Andy Warhol. Plus tôt dans l'après-midi, j'avais acheté 200 comprimés d'aspirine et une bouteille d'eau minérale et après avoir avalé (difficilement) les comprimés âcres et secs, j'attendais que le soleil se couche sur la ville, avec des tons de rouge et d'orange, regardant ces livres qui me faisaient rêver d'un au-delà plus grand, plus tolérant, plus wild.
Hubert Duprat était mon confident et j'étais le sien dans un lycée religieux intransigeant, à la discipline intraitable, et nous étions en terminale. Les seuls bons profs étaient ceux qui traitaient d'histoire et de géo et la vie était dure, sans argent, sans culture, dans une ville stupide où même les gays étaient méchants et pervers. Nous étions tous les deux fils d'agriculteurs, mon père du côté de Sainte Livrade-sur-Lot, lui du côté d'Aiguillon. Ses parents étaient gentils et nous nous retrouvions souvent chez un ami commun, Ariel, là où j'ai pris mes premiers LSD.
C'est dans cette campagne ensoleillée qu'Hubert m'a parlé pour la première fois d'archéologie et de minerais, une de ses passions d'alors. Il était capable de reconnaître de loin les tracés des voies romaines et, au début, j'étais incrédule, je pensais qu'il était impossible de discerner dans les champs des routes datant de 2000 ans. J'ai su plus tard que ces vestiges sont visibles par voie aérienne et j'étais fasciné par sa collection de pierres et de silex.
Nos vies se sont séparées après le Bac (qu'il a réussi, moi pas), mais nous avons passé 30 ans à suivre chacun le travail de l'autre et dès le début, avec ses objets d'arts conçus à partir des Trichoptères qui formaient des fourreaux de protection à base de pierres précieuses, d'or et de diamants, j'ai compris que j'avais eu la chance de grandir avec un garçon qui avait une vision, à mi-chemin entre l'art conceptuel et le musée de curiosités. Pendant longtemps, j'ai pensé qu'il m'était impossible d'écrire correctement sur son travail. Les textes érudits qui décryptaient ses expositions me semblaient incroyablement complexes, une manière de parler et d'écrire sur l'art qui m'a toujours irritée, celle d'Art Press de notre époque. Pourtant, les gens de ma génération ont bénéficié d'une éducation artistique assez poussée dans les années 70, nous avions toutes les bases pour comprendre les grandes familles de l'art et quand nous sommes arrivés à Paris, nous avons scrupuleusement visité tous les grands musées, et les petits aussi, comme celui de Gustave-Moreau. Hubert s'est installé dans le Sud, moi à Paris. Nous avons gardé le contact, même épisodiquement, tous les deux très respectueux du travail de l'autre.
Récemment, Hubert m'a envoyé deux livres et catalogues sur l'ensemble de son œuvre et je me suis dit qu'il était temps que j'exprime mon émerveillement pour tout ce qu'il a fait. Je n'avais pas besoin de décrire son cheminement avec des références érudites et je pouvais en parler avec des mots simples car ce qu'il fait m'émeut d'une manière très magique. Il y a chez lui un élément naturel et concret qui est en phase avec ce que j'admire dans la nature et chez les artistes qui font battre mon cœur plus vite, comme Richard Long, Andy Goldsworthy ou l'art artisanal japonais. Des hommes qui font des choses profondes et mystérieuses à partir de l'équilibre instable des objets naturels. Avec une méthode rigide et calculée, Hubert ouvre une porte mystique puissante qui persévère à travers le temps comme un objet vaudou, ou un objet païen et pourtant religieux. Ce qui m'a émerveillé dans les mises en scène d'Hubert, c'est le craftmenship, un travail artisanal dont je ne comprends toujours pas le mécanisme.
Par exemple, de toutes les pièces qu'il a conçues, celle que j'aime le plus ne sont pas les larves de Phryganes, que j'ai vu pourtant naître, mais "Coupé-Cloué", les troncs d'arbres recouvert de clous dorés. Ce sont ces objets qui m'ont fait poser ces questions naïves, "Comment tu as fait?". Techniquement, je voyais le travail répétitif des assistants, mais j'étais abasourdi par la précision du détail, ces lignes de clous si bien dessinées qui mettent en valeur, sans les cacher, les courbes des troncs d'arbre. Pour moi, c'est un travail très masculin, exactement comme j'ai fini par associer instinctivement le legs féminin du design de Barbara Kruger et de Jenny Holzer. J'ai toujours été envieux de ces hommes comme Richard Long qui passent des jours à marcher ou Andy Goldsworthy qui passe des mois à tourner autour de ruisseaux ou de murs de pierres. Quand Hubert m'a raconté ses voyages à Madagascar pour trouver et choisir les éclats de calcite qui sont à la base de ses constructions, j'ai compris qu'il était passé à un niveau supérieur de son travail tout en restant très fidèle à ses origines archéologiques et minières.
Et pendant ce temps, j'étais conscient de la difficulté de vivre de son travail, de l'incompréhension de sa démarche car elle reste sincèrement indépendante. Il me parlait de la difficulté d'enseigner dans des écoles d'art où l'on ne dessine plus désormais, exactement comme les professeurs réalisent aujourd'hui que leurs élèves de 12 ans passent leur vie devant YouTube sans avoir la curiosité d'aller sur Google pour découvrir tout ce que Internet peut offrir.
C'est surtout son côté intègre que j'admire le plus, une sorte de défaitisme face à la dureté du marché de l'art, comme le marché des médias est pourri, au tel point que je finis par développer un rejet pour des photographes comme Tony Richardson (ce soir chez Colette, of all places) ou Wolfgang Tillmans, qui sont intrinsèquement intéressants mais qui deviennent gerbants à cause de leur opportunisme commercial. A vouloir toujours vendre, toujours courir après le succès en se foutant à poil comme les pédés se mettent à 4 pattes sur les sites Internet pour gagner une bite, ces artistes ont perdu la dignité qu'ils avaient au début et je fais partie de ces gens démodés qui pensent que la dignité est le degré ultime de l'art, c'est ce que l'on atteint en fin de compte quand on a tout réussi et si l'on pousse le bouchon trop loin, a bridge too far, c'est l'ensemble de l'œuvre qui vacille car tout le monde n'est pas Picasso, Warhol ou même Jeff Koons.
J'aime l'art d'Hubert Duprat comme j'aime l'art de Djamel Shabazz, parce que j'y vois une ligne qui ne s'est jamais brisée entre leurs dernières créations et leurs racines modestes. Nous avons beaucoup souffert, de nos complexes et de la société dans laquelle nous avions grandi car notre adolescence a été quasi dramatique, d'une dureté implacable, celle de la chaleur étouffante du Sud-Ouest quand cette terre riche, lourde, se craquelle sous le soleil pour devenir aussi imperméable que les gens qui y vivent, toujours à vous juger et vous rendre la vie plus difficile. Ce furent des années de cauchemar quand elles devaient être les plus belles de la jeunesse et lui hétéro, comme moi homosexuel, nous avons reçu ça en pleine figure sans que personne ne nous aide ou nous comprenne. De là est né le voyage d'Hubert vers la pierre et le mien vers la musique. Nous avons grandi avec le complexe de vivre à mi-chemin entre les belles grandes villes que sont Bordeaux et Toulouse, dans un no man's land de fruits et de légumes, une plaine du Lot et de la Garonne nourricière, mais étrangement réfractaire à toute culture et cela nous a marqué à tout jamais. Même si désormais nous sommes tous les deux assez âgés pour être parvenus à dépasser tout ça depuis longtemps. Mais j'ai été témoin de la blessure d'Hubert, et il a été témoin de la mienne, et il m'a sauvé la vie, le soir des 200 aspirines, du livre des graffitis de New York et de la Factory recouverte de papier aluminium.